YAO CAROLINE ANGELINE,
ECRIVAIN, STYLISTE
ET AUTEUR DU ROMAN "NAFIASSOU".

Interview

"Nafiassou dénonce les pères indignes"

Une interview d'Olivier YRO

OY - Comment êtes-vous arrivée à la littérature alors que vous êtes styliste ?

YCA - L'art est élastique et je considère que c'est un complément à ce que je fais. La littérature et le stylisme font partie du domaine de l'art. Donc on peut mixer les deux disciplines.

OY - Mais pourquoi un roman ?

YCA - Cela s'est fait à partir du fait que j'ai un penchant pour la littérature. Je lis énormément. J'ai beaucoup été influencée par les nouvelles telles que Tribaliquesd'Henri Lopès. Ceci pour la simple raison qu'on ne rêve pas. Je préfère avoir les pieds sur terre. Avec les nouvelles, on aborde les réalités de la vie.

OY - D'où est venu le pseudonyme Nafiassou, et que signifie-t-il ?

YCA - C'est un nom Akan qui signifie "je n'espérais pas". En pays Akan c'est un pseudo qu'on donne à un enfant qui suit un cycle infernal et dont la mère a perdu plusieurs enfants avant de l'avoir.

OY - Nafiassou a-t-elle un rapport avec vous ?

YCA - Non, il n'y a aucun rapport entre "Nafiassou" et moi. Ce n'est pas mon histoire. C'est juste une fiction que j'ai relatée à partir de faits vécus dans la vie de tous les jours. Il est vrai que sur le plan caractère, elle me ressemble un peu. Je ne juge pas au premier coup (tout comme elle) mais nous n'avons pas la même histoire.

OY - Qu'est-ce qui vous a poussée à parler de l'inceste ?

YCA - L'inceste existe bel et bien, mais les gens refusent d'en parler et quand on en parle, personne ne réagit. Dans l'ouvrage il y a le viol et l'inceste. Nafiassou a réagi comme je l'aurai voulu. Je n'innocente pas le père. Certainement il ne voulait pas lui faire de mal. Et on ne peut pas savoir quel problème il avait auparavant. Sans le vouloir, il est coupable. Il est victime de l'alcool et fait en même temps des victimes. Nafiassou dénonce donc les pères indignes.

OY - Par ailleurs, les femmes ne sont pas seules victimes de l'inceste.

YCA - C'est vrai qu'une mère peut tomber amoureuse de son fils. Mais il faut reconnaître que ce sont des cas rares. Les cas que nous voyons habituellement, ce sont les cas du père qui couche avec sa fille. Nafiassou est donc une loupe qui met à nu les réalités obscènes que vivent certaines familles. Et cela ne se vit pas seulement en Côte d'Ivoire. C'est une situation qui peut arriver au Burkina, au Mali, en Europe et partout dans le monde. Certains en font un rite dont nous nous offusquons. Mais que voulez-vous, à chacun ses coutumes.

Soir INFO 1156 (12 juin 1998).


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Created: 12 January 2000
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