L'auteur nous a parlé de son roman, sa vision des Sociétés traditionnelles africaines à l'image de celle du peuple Agni. Nous vous livrons l'essentiel de notre entretien. |
Vous êtres l'auteur du roman: "Une vie hypothéquée". Pouvez-vous nous donner un petit aperçu de l'ouvrage?
"Une vie hypothéquée" est, si vous voulez, la satire de la famille traditionnelle Agni. C'est aussi un Flash Back sur les rapports des individus d'une même Société régis par des règles préétablies.
Ici, dans "Une vie hypothéquée" je rapporte en style prosaïque, bien sûr, l'histoire d'une jeune fille - Yah - fiancée avant sa naissance à Béhira. Celui-ci, âgé de 55 ans, marié depuis à deux femmes, père de famille, accordait une assistance particulière à sa future épouse dès sa naissance. Aussi les parents de Yah bénéficiaient-ils, comme il se devait en pays agni, des cadeaux de la part de Behira. Yah ne sut la vérité qu'à l'âge de quinze ans. Elle s'enfuit à Abidjan, où elle recontra Koré - ils décidèrent de vivre ensemble. Mais la décision de la famille de Yah est irrévocable. Elle finit par épouser Béhira le vieillard.
La révolte de l'héroïne dans votre roman n'est-elle pas le signe d'un échec dans son éducation dont les parents sont responsables?
Je pense que non! Dans la Société traditionnelle Agni et dans la plupart des Sociétés africaines d'ailleurs, l'éducation d'une fille est confiée à la mère. Ici dans "Une vie hypothéquée", la mère de Yah a fait ce qu'elle pouvait. Elle-même a été élevée selon les bases d'une coutume rigoureuse. Elle a éduqué Yah de cette même manière.
N'est-ce pas là l'éternel conflit de génération? Est-ce que vous ne trouvez pas que c'est un problème maintenant rabaché?
(sourire) Vous me donnez l'occasion de dire quelques mots sur l'intérêt de mon oeuvre. D'abord quel aspect de la famille Agni ai-je voulu faire ressortir? Je pense que dans les rapports des conjoints, selon la coutume Agni, la femme est beaucoup lésée. Par exemple, prenez le traitement qu'on inflige à la veuve. Elle est dépouillée de tout ce qui est bien matériel - même les vêtements. Cette attitude est due à quoi? Simplement au poids de la tradition. A telle enseigne qu'elle apparaît grotesque dans la sphère du modernisme. Voilà donc l'explication logique de l'attitude que je déplore beaucoup.
Dites moi, voulez-vous ressembler particulièrement à un personnage d'"Une vie hypothéquée"? Lequel?
J'ai beaucoup d'affinité pour l'héroïne, mais je voudrais vivre l'expérience de sa mère: attendre un enfant et avoir un «candidat» pour parier sur son sexe. Ensuite obtenir des cadeaux de la part du prétendant.
Je conçois votre roman de cette façon: Yah se révolte et s'enfuit pour Abidjan, elle y rencontre le jeune Koré. Au moment où je m'attendais à une cassure avec la tradition vous rejetez Yah dans les griffes du vieillard. Pourquoi avez-vous «bouclée» Yah?
Je crois que vous avez vu juste. C'est le symbole des traditions, croyances, parents, qui pèsent sur les conjoints. Un couple n'est sauvé que lorsqu'il s'est défait de ces liens-là. Aussi je n'ai pas voulu livrer Yah pour ne pas donner un mauvais exemple aux jeunes filles. Et puis il faut reconnaître qu'elle ne pouvait pas se libérer. Si c'était le cas Yah se verrait dans le gouffre de la prostitution. J'aurais pu libérer Yah si elle avait été à l'école.
Quel est votre point de vue sur le mariage entre conjoints d'ethnies différentes?
C'est une très bonne chose. La diversité ethnique ne doit pas éloigner les Africains. Il faut accepter de se laisser découvrir et aller à la découverte de l'autre. Ce n'est qu'à ce prix qu'on peut espérer une paix durable entre les peuples, les pays et les nations.
Comment voyez-vous la Société traditionnelle Agni?
Je pense sincèrement que la société Agni d'avant était un peu matérialiste. Les biens et l'héritage sont souvent sources de querelles familiales.
Avez-vous un manuscrit dans vos tiroirs?
Oui! J'ai plutôt des manuscrits. Un autre est même sous presse, je l'ai intitulé: "A qui la faute".
Qu'est-ce que vous aimez dans la tradition?
J'aime beaucoup l'esprit de famille élargie, la vie en communauté dans la tradition.
Et qu'est-ce que vous rejetez?
Ah! Je n'aime pas le traitement qu'on inflige aux veuves.