MICHELINE COULIBALY
"L'HOMME AFRICAIN
A BEAUCOUP D'AFFECTION
ET DE RESPECT POUR LA FEMME"
MME MICHELINE COULIBALY, ECRIVAIN IVOIRIENNE, EST CHEF DE SERVICE A L'OFFICE CENTRAL DE MECANOGRAPHIE (OCM) A ABIDJAN. ELLE EST MEMBRE DU BUREAU DE L'ASSOCIATION DES ECRIVAINS DE COTE D'IVOIRE (A.E.C.I.). SES PREMIERES OEUVRES PARUES EN 1988; "LE CHIEN, LE CHAT ET LE TIGRE"; "NAN, LA BOSSUE"; "LE PRINCE ET LA SOURIS BLANCHE" S'ADRESSENT AUX ENFANTS. |
Aujourd'hui, elle révèle une autre facette de son talent avec la parution du recueil de nouvelles intitulé Embouteillage publié chez EDILIS, une nouvelle maison d'édition ivoirienne. Mme Micheline Coulibaly a bien voulu nous recevoir pour un entretien.
Mme Coulibaly, on vous connaît pour vos ouvrages de littérature enfantine et vous voilà dans le genre adulte. Cela mérite une explication?
J'ai toujours écrit pour les deux publics mais j'ai fait un choix pour la littérature enfantine car je suis fascinée par le monde des enfants. J'ai trois enfants. En outre, je suis entourée par une ribambelle de nièces, de neveux. J'aime beaucoup les enfants car leurs sentiments sont vrais. Néanmoins, je continue d'écrire des romans et des nouvelles. C'est maintenant qu'on publie un texte de moi pour les adultes.
Vous êtes une informaticienne et la littérature vous passionne?
Je travaille au sein d'une société informatique mais je dirige un service de relations publiques. Je suis la responsable des achats.
D'où vous vient votre passion pour l'écriture?
Cela remonte à très longtemps. Je suis de père ivoirien et de mère viétnamienne. Après Diên Biên Phu, mes parents sont venus s'installer en Côte d'Ivoire dès l'année 1956. Quand je suis arrivée à Abidjan, je ne parlais que le vietnamien, ma langue maternelle. Ici, j'ai été impressionnée par le français et j'ai décidé de m'y mettre très rapidement en lisant beaucoup. Vous savez autant que moi combien la lecture développe l'imagination.
Comment vos parents se sont-ils rencontrés?
C'était en pleine guerre. Mon père faisait partie de l'armée française. Et c'est à Saïgon qu'il a rencontré ma mère, alors veuve, qui tenait un petit commerce. Elle avait déjà deux enfants. Ma mère fait partie de la noblesse de Hué. Elle vit avec moi à Abidjan. Moi, j'ai réussi à m'adapter aux coutumes africaines. Je me sens Africaine. Mon mari, que j'ai rencontré à l'université, est ivoirien.
Venons-en maintenant à votre dernier livre intitulé "EMBOUTEILLAGE"?
C'est un recueil de huit nouvelles qui présentent des personnes dans des situations d'infidélité ou qui voient leurs sentiments contrariés.
Comment expliquez-vous l'infidélité féminine, notamment dans la nouvelle "Sauve qui peut!" où Solange trompe son mari Blaise?
Avec une femme, tout commence dans l'euphorie, surtout dans le cas de Solange qui vient d'épouser Blaise. Mais très rapidement elle s'ennuie car elle est abandonnée. C'est vrai qu'elle a la richesse mais cela ne suffit pas. Quand une femme est seule, elle fait des bêtises. L'homme doit le savoir et lui donner beaucoup d'affection. Solange délaissée par son mari avait besoin de tester sa féminité. Je ne la soutiens pas mais je la comprends.
Personnellement, quelle image avez-vous de l'homme africain?
Je vais surprendre, mais l'homme africain a beaucoup d'affection et de respect pour la femme. Il a le sens de la famille large. Le seul reproche que je lui fais, c'est de ne pas faire de sa femme une compagne, une confidente. Il doit avoir plus de complicité avec sa femme. Je crois que c'est la famille élargie qui crée cette distance.
Dans une de vos nouvelles, "Mon homme", on voit que Josée quitte son mari qui est pourtant riche?
C'est vrai qu'elle avait la richesse et l'honneur. Mais elle ne peut pas continuer à souffrir toute la vie car son mari la délaisse pour une fille plus jeune. A l'automne de sa vie, Josée pense que le plus important dans la vie c'est de se sentir aimée par l'homme qu'elle aime. Et cela est indispensable. Malgré les largesses de son mari, elle ne peut pas accepter d'être une roue de secours.
Un homme peut-il aimer continuellement une femme?
Vous savez, l'amour évolue. On peut aimer longtemps et tout le temps. Au début, c'est l'amour passion. Ensuite, l'amour est plus raisonné, plus intime. Ce n'est plus l'exubérance du début. Avec l'âge, vous partagez les mêmes soucis, les mêmes joies, le suivi de vos enfants. Et tout cela constitue un amour plus solide et plus durable.
Un personnage de votre livre parle ainsi à sa fille: "Tant que tu sentiras que l'amour qu'il a pour toi n'a pas faibli, ma fille, ferme les yeux et pardonne! L'homme est un grand enfant et il lui arrive d'avoir des caprices. De la même façon que tu pardonnes à ton enfant qui a fait une bêtise, pardonne à ton époux ses petits écarts."
C'est ma propre mère qui aime répéter ces phrases. Je ne partage pas ce point de vue.
Comment jugez-vous l'infidélité de l'homme?
Parfois c'est un mal nécessaire. Mais rien ne justifie l'infidélité de l'homme. Il n'a pas à le faire. De nombreux foyers ont été brisés pour cause d'infidélité masculine. Je crois que si ça ne va pas, on s'assoit, on discute. On met les points sur les i et on repart à zéro au lieu de se déchirer et de pleurer inutilement.
Et la polygamie?
Une femme, on l'aime. Quand vous ne l'aimez plus, qu'elle cède sa place. Mais deux femmes à la fois, c'est impossible de les aimer. Tôt ou tard c'est une qui va souffrir. C'est mon humble avis.
On remarque dans la nouvelle "Mon homme" que le mari de Solange veut épouser une fille qui a l'âge de leur premier enfant?
J'ai pitié des hommes qui "sortent" avec des filles qui ont l'âge de leurs enfants à l'instar du mari de Solange. Quelque part, ils ont un problème. Ce sont des irresponsables. Ils hypothèquent l'avenir de ces filles. Ils ont peur de vieillir. Ils pensent obtenir une nouvelle jeunesse.
Quelle est la différence d'âge idéale entre l'homme et la femme?
En général, l'écart idéal entre l'homme et la femme doit être de 15 à 20 ans. Pas plus. Car la différence de mentalité sera préjudiciable au couple qui n'aura pas le même centre d'intérêt, le même but, les mêmes regards. J'ai une amie dont le mari est largement en avance au point de vue âge. Aujourd'hui, elle s'ennuie...
Quels sont vos projets littéraires?
Je continue d'écrire pour les enfants. Actuellement, je travaille sur un roman. En même temps, j'écris des nouvelles pour un recueil.
Quels sont vos loisirs?
La lecture, évidemment. La cuisine, surtout la cuisine vietnamienne. Elle est très saine, pas trop grasse avec beaucoup de légumes et très variée en viande. Je fais souvent, pour m'amuser, le service traiteur pour mes amis. Je pratique aussi le judo mais avec l'âge, je m'adonne davantage à des sports plus simples.
Aimeriez-vous revoir le Vietnam?
Bien sûr. Surtout le site de ma naissance. Par ma mère, je suis du Centre, un endroit très agréable où se trouvait la cité impériale.
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