Voix des cascades
Cécile-Ivelyse Diamoneka
La littérature congolaise féminine fait son petit bonhomme de chemin. Après Marie-Léontine Tsibinda, Amélia Nene, Céline Bikoumou et Sylvie Bokoko, Mme Cécile-Ivelyse Diamoneka vient de faire son "entrée en poésie".
Cet épanouissement lyrique féminin en République populaire du Congo est confirmé par l'engouement des générations montantes pour ce genre. Elles donnent à entendre que le succès des aînés ne sera pas sans lendemain.
"Voix des cascades" est une plaquette de 23 poèmes récemment publiée par Présence africaine. Cette jeune poésie fait référence à l'enfance de l'auteur, à la mort qui frappe toujours, à la paix, à l'amour...à la traite négrière. Elle exprime l'espoir et la joie de vivre, les préoccupations des pays engagés dans la lutte de libération nationale.
Licenciée en sciences de l'éducation, Mme Cécile-Ivelyse Diamoneka est inspectrice mixte: écoles primaires et écoles maternelles. Directrice de la formation continue au niveau du ministère de l'Education nationale, elle est depuis le 5e Congrès ordinaire de l'Union révolutionnaire des femmes du Congo, tenu en mars 1982, secrétaire chargée de l'éducation et de la promotion féminine du secrétariat permanent du conseil central de cette union. Mariée, elle est mère de sept enfants.
La première question qui me vient à l'esprit est celle de vous demander, Madame ce qu'est la poésie pour vous et depuis quand vous la pratiquez?
La poésie est pour moi, le genre littéraire qui s'imprime le mieux dans l'être humain. Elle est le chant intrinsèque que l'homme entonne sous diverses formes. Je la vis depuis ma prime enfance. Mais, sous forme écrite je la pratique depuis quelques années seulement.
Mais pourquoi choisissez-vous ce mode d'expression peu accessible pour communiquer vos idées?
En fait la poésie n'est pas si inaccessible... J'entends la pratiquer parce que, en tant que chant, je l'entonne pour soutenir mon existence.
Mais la poésie se meurt, Madame?
La poésie ne se meurt pas réellement parlant. Ce sont les affairistes mûrs, de plus en plus par le goût des interêts commerciaux qui considèrent et proclament que la poésie ne vaut plus rien.
Vous êtes-vous essayée en d'autres genres tels que le roman, la nouvelle, le théâtre par exemple?
Oui, la nouvelle. Mais je n'en suis pas encore au stade de publication.
Maintenant, venons-en à votre recueil "Voix des cascades". En le lisant, on a l'impression que vous abordez nombre de thèmes, notamment la lutte des peuples, la souffrance humaine, l'amour, les esprits des morts... Est-ce que vous y croyez vraiment?
Il n'est pas tant question de croire à ces choses que de les sentir comme existantes dans notre univers quotidien. Et certaines de "ces choses" constituent bien l'objet, sinon de notre foi, du moins de nos aspirations.
Mais pourquoi ce titre "Voix des cascades"?
Le fait de donner un titre à une oeuvre comme un nom à un enfant qui vient de naître n'obéit pas automatiquement à un jeu de mathématique qui repose sur l'absolu, exemple: 2 x 2 = 4. Je considère donc que donner un titre à une oeuvre littéraire est question tout simplement de faire jouer sa fantaisie et sa sensibilité car il faut bien donner un titre.
Alors, pourquoi "Voix des cascades"? C'est une image inspirée par la correspondance entre ma sensibilité et le phénomène puissant qui nous environne à savoir: les cascades du puissant fleuve Congo. Pourquoi pas cataractes me direz-vous? car sous la plume des géographes on trouve plutôt le mot cataracte (les cataractes du Congo), le mot cataracte n'aurait pas été plus heureux pour moi. C'est donc une question de fantaisie.
On mesure aussi à quel point vous êtes sensible aux valeurs d'art, à la musique, à la chanson entre autres...
Sans doute pour moi la chanson ou le chant c'est ce qui dynamise tout homme et toute société, car dans l'univers il n'y a pas un seul peuple qui ne chante pas. Pour moi, j'aime chanter, je chante toujours et partout.
Vous êtes l'une des rares Africaines (la deuxième Congolaise après votre consoeur madame Amélia Nene) à avoir publié chez Présence africaine. Voulez-vous nous dire comment vous vous y êtes prise?
Il n'y a pas de recettes particulières à cela. L'unique qui soit connue de tous c'est de confier le manuscrit à un certain nombre d'éditeurs qui vous donnent leur avis. Il s'est trouvé que Présence africaine a donné un avis favorable à mon manuscrit. C'est tout.
Pour ceux qui vous connaissent, vous êtes Mme Sébastien Matingou (directeur général des affaires culturelles de la République populaire du Congo). Peut-on savoir pourquoi vous avez voulu publier votre première oeuvre sous votre nom de jeune fille?
Simplement parce que j'ai voulu évoquer, dans ce recueil, bien des souvenirs d'enfance. Alors nous avons convenu, mon mari et moi de signer du nom de jeune fille. Cela ne choque personne en famille.
Ecrire demande beaucoup de temps et surtout de sérénité. Que je sache, vous êtes mère de famille. A quel moment vous mettez-vous à votre bureau de travail?
J'écris chaque fois que je sens le besoin de le faire: à la maison, au bureau, en voyage, etc. Il n'y a pas de temps à cette activité.
Quelle est la part de la lecture dans votre vie?
Comme tout enseignant, la lecture occupe une part importante dans ma vie culturelle. Je m'attarde souvent dans les bibliothèques et en famille nous achetons souvent des livres de tous genres.
En tant que poétesse, comment concevez-vous votre rôle dans la société?
Confier aux autres ma façon de voir le monde.
Vous me permettez une digression. En effet, vous êtes secrétaire à l'éducation et promotion féminine à l'Union révolutionnaire des femmes du Congo; quels objectifs poursuivez-vous?
Les objectifs sont ceux de réaliser un jour l'éducation complète et la promotion en milieu féminin. Mais c'est une tâche de longue haleine qui demande beaucoup de courage et d'abnégation.
Pensez-vous que notre civilisation gagnerait à écouter la voix des femmes?
Je vous retourne votre propre question car, je ne saurais y répondre, moi.
Pour terminer, revenons-en si vous le voulez bien à la poésie. Quels sont vos modèles dans ce genre?
Il est vrai que je lis beaucoup. Ce qui me familiarise avec beaucoup de poètes, romanciers et nouvellistes de plusieurs nationalités. Mais, je n'ai pas d'autres modèles que la poésie elle-même. J'essaie de me frayer un chemin à moi.
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