Rashidah Ismaili est née à Cotonou. Sa mère était originaire du Bénin et son père du Nord du Nigeria, de Kano. Elle a passé les premières années de sa vie avec ses grands-parents. Son grand-père avait fondé une école coranique où elle a brièvement suivi des cours mais il y eut une polémique du fait qu'elle était une fille fréquentant une école avec des garçons. Elle en fut donc retirée et passa un an dans une école de missionnaires catholiques, ce qui n'a pas été une bonne expérience pour elle. A la mort de sa mère, elle fut envoyée en pensionnat en France pendant six ans. |
Quand votre passion d'écrire vous est-elle apparue ? Quel genre de livre écrivez-vous ?
J'ai toujours été passionnée d'écriture. Tout ce que je vois, que j'entends ou que j'expérimente est conservé dans un coin de mon cerveau et soudain j'éprouve le besoin de le coucher sur le papier. J'écris toutes sortes de textes: poèmes, essais, romans et pièces de théâtre. D'ailleurs, une collection de mes histoires courtes doit sortir à la fin de cette année et la pièce "Rice Keepers" sera publiée cet automne.
Etant d'origine béninoise, vous auriez pu vivre en France. Pourquoi avoir choisi de vivre à New York City ?
Je me suis mariée à l'âge de quinze ans avec un Nigérian qui poursuivait ses études à New York. Il a obtenu une bourse afin que je le rejoigne. Je suis donc venue ici pour y étudier. Par la suite, je suis restée car j'ai trouvé un emploi peu après avoir obtenu mon diplôme de fin d'études. J'ai été professeur, psychologue, conseillère dans diverses universités pendant une trentaine d'années. Puis, j'ai pris ma retraite en 2000. Maintenant, je fais des interventions et des conférences dans le monde et j'interviens dans le cadre du Master de l'Université Wilkes à Wilkes-Barre en Pennsylvanie. Il s'agit d'un "Master of Arts" en ligne dans le "Creative Writing Programme". Enfin, je continue à enseigner et à travailler sur la Poésie et le Théâtre.
Quelles difficultés rencontrez-vous en tant qu'écrivain à New York City ?
Etre écrivain à temps plein n'est pas facile, à New York comme partout ailleurs probablement. J'ai dû travailler toutes ces années pour continuer à écrire mais aussi pu subvenir aux besoins de mon fils, Daoud. Je ne pense pas qu'il y ait des difficultés spécifiques en tant que femme écrivain. Je pense plutôt qu'il est difficile d'être un artiste ayant une intégrité politique. C'est d'autant plus difficile pour les écrivains d'origine africaine à cause du racisme qui est enraciné dans la société. Aussi, si vous créez des personnages ou des situations dont le système ne veut pas, il réprimera l'œuvre en la rejetant, en la critiquant ou tout simplement en ignorant son existence.
Quelle est la place des femme écrivains d'ascendance africaine aux Etats-Unis ?
Maintenant, les femmes écrivains sont présentes dans un grand panel de genre. Bien entendu, nous avons nos modèles: Maryse Condé de Guadeloupe, Ama Ata Aidoo du Ghana, Nawal al Saadawi d'Egypte et une longue liste d'Américaines commençant par Toni Morrison et avant elle Zora Neale Hurston.
Comment se caractérisent les relations entre maisons d'édition et écrivains africains ?
Il y a quelques femmes d'ascendance africaine à des postes
élevés, dans des grandes maisons d'éditions pour suivre
le livre pendant le long processus d'édition. Beaucoup de femmes optent
pour l'auto-publication tandis que d'autres choisissent des petites maisons d'éditions connues sous le nom de Small
Press.
Mon éditeur est africain, dans une maison d'édition bien
établie. Il a la réputation d'être très travailleur
et consciencieux afin d'être sûr que le travail des personnes d'origines
africaines est bien enregistré et bien distribué.
Beaucoup d'écrivains font leur propre marketing et organisent à leurs propres frais des tournées promotionnelles pour lire et vendre leurs livres. Je sais que vous êtes très attentive à l'actualité culture de la diaspora africaine. A vos yeux, quels écrivains africains attirent votre attention ces temps-ci ?
Je me tiens au courant de ce que font les jeunes auteurs. Certains d'entre eux s'adaptent à la tendance du moment et essaient d'écrire ce qui est certain de plaire aux lecteurs occidentaux. C'est une opportunité en or de partager culture et récits africains. Mais je continue d'être inspirée par des femmes proches de mon âge parce qu'elles continuent d'explorer de nouveaux terrains. Dans quelque temps, nous allons voir émerger de bons livres d'Afrique australe ; par ailleurs, les Nord-Africaines écrivent extrêmement bien. Malheureusement, nous venons juste de perdre un merveilleux écrivain : Yvonne Vera du Zimbabwe. Actuellement, mes auteurs favoris sont Nuruddin Farah originaire de Somalie vivant actuellement en Afrique du Sud, Chinua Achebe d'origine Nigeriane vivant à New York. J'adore les poèmes de Lucille Clifton, elle a retracé sa généalogie jusqu'au Dahomey. J'aime aussi les écrits de Sonia Sanchez, Amiri Baraka, Kamau Brathwaite et Willie Kgositsile.
Par Akouavi Assogba Migan