Derrière la discrétion apparente de cette jeune femme, se cache une personne engagée, une enseignante qui, au quotidien, se bat pour inculquer à ses élèves des valeurs d'élévation sociale, par le savoir et la connaissance. Née en septembre 1971 à Libreville d'un père originaire de Guinée Conakry et d'une Gabonaise, Peggy Lucie Auleley écrit avec beaucoup d'aplomb et de conviction. Mère de trois enfants, elle lève le voile sur son univers et sur la femme qu'elle est. |
Comment êtes-vous arrivée l'écriture?
A l'issue d'un concours littéraire lancé en 1995 par le PNLS (Programme National de Lutte contre le Sida, ndlr), j'ai obtenu le 3e prix. En 1998, j'ai remporté le 2e prix du concours de littérature africaine pour enfants initié par l'ACCT, l'actuelle Agence Intergouvernementale de la Francophonie. Je pense que c'est de là que tout est véritablement parti. Cependant, je dois dire qu'à l'école primaire, j'aimais déjà «le cahier d'amitié» où j'écrivais beaucoup.
Professeur des lycées, vos élèves sont-ils réceptifs à vos œuvres ou celles de vos confrères gabonais?
Mes élèves disent que j'écris bien, mais qu'il existe dans mes écrits des passages pas toujours faciles à comprendre. Ils sont aussi réceptifs aux oeuvres des autres écrivains gabonais...
Dans « Les Larmes du Soleil », vous abordez le thème de l'enfance défavorisée. Comment jugez-vous aujourd'hui la situation au Gabon?
Sans être politique, je trouve que la situation est catastrophique dans notre pays. Les enfants de rue sont de plus en plus nombreux. Je les rencontre souvent, pratiquant nombre de petits métiers qui n'honorent ni la maternité, ni la famille qui devrait les protéger. J'accuse, mais qui accuser réellement? J'entends des discours, je regarde les journaux, j'ai assisté à quelques manifestations sur les droits des enfants, mais je n'ai pas l'impression que ces droits soient respectés. Le droit d'aller à l'école, par exemple, ne semble pas faire l'unanimité dans certaines familles. C'est un peu comme si ces enfants n'avaient comme seul droit que celui d'aller jouer les "aboyeurs" à la Gare routière.
Le personnage central de votre roman est une femme forte qui prend sa vie en main envers et contre tout. Quel message souhaitez-vous transmettre au travers de ce roman?
Une femme, Mathilde Ndjakiyo, prend sa vie en main pour démontrer que la femme en tant qu'être soit disant faible, ne l'est pas du tout. Elle est une femme de pouvoir. Il lui suffit de croire en ses capacités, de déployer son intelligence et de travailler de ses mains pour parvenir à ce qu'elle veut. Ne clame-t-on pas que « ce que femme veut, Dieu le veut »?
Plusieurs thèmes sont abordés dans le roman. Que peut nous dire l'auteure que vous êtes sur la quête de l'amour, la préservation des valeurs traditionnelles, la place de la femme dans la société gabonaise actuelle?
Je dis que l'amour devrait ne pas se quêter mais se vivre, surtout dès que l'on a fait le choix d'aimer. Or, nombre d'incompréhensions s'observent, des évènements inattendus adviennent. Rechercher l'amour, c'est vouloir vivre un équilibre capable de nous donner des ailes. Sur la préservation des valeurs traditionnelles, je voudrais rappeler, à propos du ndjembè et du mboumba, que ces rites apportent aux pratiquants de beaux enseignements sur la façon de se comporter et d'agir, dans le respect des êtres et des choses. Quant à la place de la femme dans la société actuelle, avouons que c'est une des plus honorables. Pour l'avancée de la société, la femme, quoique n'étant pas toujours magnifiée par l'homme lorsqu'il s'agit de compétence, travaille avec ses tripes et même ses entrailles.
Un message ou un voeu pour terminer?
En guise de conclusion, je souhaiterais que la littérature gabonaise jouisse enfin de la reconnaissance qu'elle mérite, tant auprès des inspecteurs d'académie, des enseignants, des élèves que des décideurs politiques. II est temps que ceux qui le peuvent assurent sa promotion et sa vulgarisation.
Propos recueillis
par Edna Merey
&Oelig;uvres de Peggy Lucie Auleley:
"L'héritière du Jaspe". Libreville: Éditions Odette Maganga, 2012.
"Les larmes du soleil". Libreville: Éditions Odette Maganga, 2011.