Congolaise de Brazzaville, elle chante avec le groupe de rap Pyranien Suprême. Célibataire, mère d'un enfant de dix ans, Claudia a un baccalauréat en section commerciale obtenu à Kinshasa. Elle a décroché un BTS en secrétariat de direction tout en étant dans la vie active. Désireuse d'aller plus loin, elle suit une formation par correspondance pour devenir assistante en marketing et action commerciale. Aux éditions Hemar créées (en 1990) par le Professeur Mukala Kadima-Nzuji de l'université Marien Ngouabi de Brazzaville, Claudia Mokoko Guikochi exerce les fonctions de responsable marketing, ventes et promotion. Leurs ouvrages sont publiés en français. Elle est par ailleurs trésorière de l'Association des écrivains du fleuve Congo, qui a récemment vu le jour. |
Vous travaillez aux éditions Hemar ?
Oui. Les éditons Hemar sont opérationnelles depuis seulement 2000. Nous sommes une petite entreprise dirigée par un directeur général qui définit la politique éditoriale et coordonne toutes les activités. Je m'occupe du marketing, des ventes et de la promotion des livres, pour mieux vendre l'image de notre maison. Les éditions Hemar renforcent l'édition en Afrique centrale et consacrent la littérature sur les deux rives du fleuve Congo. Elles mettent le livre en valeur par des expositions, des conférences, et offrent une meilleure diffusion et une excellente connaissance des textes d'auteurs des deux rives.
Quel genre de livres publiez-vous ?
Toutes sortes de livres. Nous avons cinq collections: Récit, Fiction, Essai, Etude, Réflexion-Méditation, Spiritualité, et Varia. Nous recherchons la qualité littéraire et la profondeur des idées exprimées. Nous avons publié des romans et des ouvrages de philosophie, de science politique, d'économie. Tous les manuscrits qui répondent aux questions que posent notre environnement nous intéressent au plus haut point. Un essai comme celui du philosophe congolais Charles Zacharie Bowao, intitulé "La Tolérance", explique en gros les raisons des conflits qui déchirent le monde à cause du refus des gens d'accepter la différence. Un tel écrit nous intéresse. Nous l'avons publié avec beaucoup de plaisir. Ce livre est parmi nos meilleures ventes.
Pourquoi une telle ouverture alors que la tendance dans l'édition est à la spécialisation ?
Pour permettre à tout le monde de s'exprimer, de se faire connaître. Nous recevons des manuscrits qui vont du roman à l'essai politique en passant par des confessions. Au départ, nous pensions nous limiter à la publication de cinq titres par an. Aujourd'hui, notre ambition est de dépasser ce chiffre. Cinq livres sont déjà parus, et notre programme de publication en prévoit trois autres pour le dernier trimestre 2008.
Nous avons l'impression que de nos jours, les gens préfèrent le petit écran aux livres.
N'ayez crainte ! Le livre a la peau dure. Je ne pense pas qu'il puisse disparaître. Il tire profitées nouvelles technologies pour sa rédaction, son édition et sa diffusion. Il ne sera pas pour autant remplacé. La mort du livre n'est pas pour demain. Souvenez-vous qu'à l'apparition de la télévision, beaucoup d'observateurs avaient pense que le livre allait disparaître. Le livre est toujours là. L'informatique exerce une réelle séduction sur les populations. L'édition électronique, avec ses publications en ligne, n'occulte pas le bon vieux livre. On peut dire que ces moyens modernes et le livre sont complémentaires et contribuent chacun à sa manière, à diffuser les connaissances le plus largement possible. Le livre est un bien symbolique qui s'apprécie sur d'autres bases qu'une boîte de conserve. Il y a certainement des risques. Mais il faut savoir les prendre si l'on veut faire quelque chose.
Quelles sont les difficultés de votre parcours ?
La première, c'est la marque d'attention des pouvoirs publics pour le secteur du livre. Les éditeurs ne reçoivent pas de subventions. Les banques ne prennent pas de risques. La téléphonie mobile qui aide la musique et les sports reste indifférente à l'édition. Il ne nous reste plus qu'à compter sur les bonnes volontés. Ce n'est pas évident de trouver des particuliers qui investissent dans le livre.
Combien de temps mettez-vous pour sortir un livre ?
Un délai de six mois est requis.
Quand un manuscrit arrive chez vous, quel est le processus qui le conduit jusqu'à la vente ? Etes-vous impliquée dans ce processus ?
Une fois le manuscrit transformé en livre, j'entre dans la danse. Je prends des contacts avec les librairies et autres points de vente, qui acceptent de diffuser nos livres. J'assure le service de presse. Je discute avec ceux qui exercent les activités de critique littéraire. J'organise des séances de dédicaces. Je procède au mailing par Internet. Mon souci est de diffuser le plus largement possible l'information relative à nos publications.
Etes-vous satisfaite de vos ventes ?
Nos meilleures ventes, nous les réalisons lors des séances de dédicaces que nous organisons à chaque parution.
Vos relations avec les autres maisons d'édition sur place et à l'étranger ?
Nous avons de bonnes relations avec les maisons d'édition de Brazzaville. En ce qui concerne les maisons d'édition étrangères, nous coéditons certains livres avec Présence Africaine et L'Harmattan. Nous recevons beaucoup de propositions de coédition. Nous ne sommes pas toujours preneurs. Il est vrai que la coédition amoindrit le coût de fabrication et permet une meilleure diffusion du livre, mais il ne faut pas qu'elle constitue l'essentiel de l'activité éditoriale. Nous choisissons les bonnes librairies de Brazzaville et de Pointe-Noire. En République démocratique du Congo, vous trouverez nos livres à la librairie Kinépolis du Grand-Hôtel Kinshasa. A Paris, ils sont diffusés par Présence Africaine et L'Harmattan. A Bruxelles, ils sont disponibles au siège de l'ONG belge Coopération pour l'Education et la Culture. Nous souhaitons organiser des rencontres culturelles une fois par an. Le 4 juillet, nous avons organisé les premières "Rencontres des écrivains du fleuve Congo" autour du thème "Construire un espace commun par la pensée et l'écriture". Ces rencontres ont réuni six écrivains de Kinshasa et six écrivains de Brazzaville qui ont fait une déclaration préconisant la création d'une association des écrivains des deux Congo. Le 29 août, l'association est née à Brazzaville.
Quels sont vos objectifs ?
L'association poursuit six objectifs: l'organisation périodique des "Rencontres des Ecrivains du Fleuve Congo"; la promotion des œuvres et de leurs auteurs dans l'espace congolais et à l'étranger; l'organisation et le développement des actions qui placent le livre au centre de la mission culturelle des Etats et suscitent des mesures incitatives de la part des pouvoirs publics; l'attribution de prix littéraires qui récompensent un auteur de l'espace congolais pour les qualités humaines et littéraires de son œuvre ou une institution culturelle qui aura produit des œuvres favorisant le rapprochement des peuples des deux Congo; la mise en place d'une banque de données sur les auteurs de l'espace congolais et leurs œuvres; le lancement d'un organe de liaison pouvant servir de creuset aux jeunes talents et d'échange d'expériences entre les membres.
Y a-t-il un espace réservé à la littérature de jeunesse dans votre maison ?
Pour le moment, elle n'a pas encore de place chez nous. Peut-être créerons-nous une collection l'année prochaine pour y accueillir les nombreux textes que nous recevons et qui sont destinés aux jeunes ! Nous remarquons que les d'Africaines écrivent, c'est une très bonne chose. Les portes des Editions Hemar leur sont ouvertes.
Vos loisirs ?
Le cinéma est l'un de mes loisirs préférés. J'essaie de m'organiser pour pouvoir m'occuper de moi, de mon fils et de mes activités professionnelles. Tout est donc question d'organisation. Pour moi, chaque seconde, chaque minute et chaque heure est à saisir.
Propos recueillis
par Marie-Léontine Tsibinda
Contact: BP 145 45 6, avenue du Général de Gaulle - Marché - Plateau Centre-Ville - Brazzaville - République du Congo - Mail: [email protected]