Juriste de formation, Mme Nandogngar née Clarisse Nomaye est arrivée dans le cercle très fermé des écrivaines tchadiennes avec son roman « L'Amitié sans Frontière » publié aux éditions Edilivres. À travers son ouvrage, cette mère de quatre enfants nous montre les merveilles de l'amitié entre trois femmes issues de milieux sociaux différents. |
Comment vous est venue l'idée d'écrire un livre?
J'ai toujours aimé écrire. J'ai longtemps été spectatrice et actrice de la société avec son lot de choses qui dérangent et d'autres intéressantes à préserver. Ainsi, il y a par exemple des pratiques traditionnelles comme le mariage précoce et la maltraitance des jeunes enfants qui ne favorisent pas le plein épanouissement des jeunes filles dans la société. D'autres pratiques en revanche permettent à la jeune fille d'assumer son rôle de mère et d'épouse et doivent donc être transmises de génération en génération. J'ai choisi le roman comme moyen d'expression.
Pourquoi le titre « l'Amitié sans frontière »?
C'est un titre parlant que je recherchais. On parle de médecins sans frontière, reporters sans frontière... Alors pourquoi pas d'une amitié sans frontière? Simplement!
À travers vos personnages principaux, voulez-vous faire ressortir les conditions de vie de la femme tchadienne et de la femme africaine en général?
En effet, oui. La femme tchadienne et au-delà africaine est encore confrontée à beaucoup de défis pour se faire une place dans la société. Elle est tiraillée entre le modernisme et la tradition.
Pourtant Angie, Bernadette et Samantha sont issues de milieux sociaux différents (une prostituée reconvertie, une intellectuelle, une docile à la tradition), leur chemin ne se croiserait pas dans la vie quotidienne, qu'est-ce qui les a unies?
Les trois personnages se sont retrouvés dans un même quartier par le fait du hazard. Elles ont appris à se connaître et ont développé une amitié sans pareille. Elles se sont acceptées et ont décidé de partager leurs joies et leurs peines en tant qu'humains, simplement, et non en considération de leurs origines respectives.
Plusieurs années après, Angie est revenue demander pardon à sa tante qui l'a trop maltraitée lorsqu'elle l'élevait, que voulez vous exprimer par ce geste?
Il y a quelqu'un qui a dit que lorsque l'on demande pardon, ce n'est pas forcément pour le bénéfice de celui ou celle qui vous a fait du mal. On peut demander pardon pour avoir la paix intérieure et se libérer d'un acte du passé qui gêne. Et c'est ce qu'a fait Angie, elle voulait écrire une nouvelle page de sa vie.
Que voulez-vous exprimer en donnant des noms des personnages et des villes en votre dialecte (Kemndoul, Kondew, Kaoudé, Ndarda, Kaubekade...)?
Nous utilisons déjà la langue française pour nous exprimer. Je voulais apporter un peu d'originalité à mon roman. C'est pour cela que les noms des villes et des personnages sont dans ma langue maternelle, le « nang-nda ». Je voudrais partager avec chacun la richesse de la langue.
La description de la cérémonie de remise de dot, l'accompagnement de la nouvelle mariée au foyer avec son trousseau de mariage, la préparation de la sauce longue très prisée au Tchad, est-ce une façon de faire connaître votre culture?
Je crois que nous avons besoin de connaître d'où nous venons pour savoir où nous allons. C'est très important pour chaque personne de connaître ses valeurs culturelles et, si l'occasion se présente, de pouvoir les partager avec le reste du monde. C'est ce que j'ai essayé de faire à travers la description des cérémonies de mariage de chez nous.
N'avez-vous pas rencontré de difficultés pour l'édition de ce livre?
L'édition d'un premier roman est un processus pas toujours facile. Je suis d'abord mère et épouse, ce qui constitue déjà un travail 24 heures/24. Il m'a fallu trouver du temps pour écrire. Le seul moment libre pour moi était la nuit après que tout le monde soit au lit. Il a ensuite fallu trouver des personnes disponibles pour me relire. Enfin une fois le manuscrit prêt, j'ai dû identifier les maisons d'édition et en choisir une.
Pensez vous déjà au prochain livre?
Oui, mais sa parution ne sera pas pour tout de suite. Je travaille encore sur le manuscrit. Je voudrais prendre le temps de voir comment évolue « L'Amitié sans frontière ».
Propos recueillis
par Aline Taroum