Billet de Fatoumata KANE
Journée de la femme
8 mars 2010
Nos yeux se rivent du côté du centre Delwendé de Ouagadougou et bien d'autres qui accueillent les femmes accusées de sorcellerie qui ont été chassées de leurs foyers, quartiers et villages.
Que représente pour elles le 8 mars ? Le malheur d'être nées femmes dans un pays pauvre ou les esprits sont encore hantés par des histoires tragiques et surréalistes de sorcellerie fondées sur des apriori totalement maléfiques qui font de ces femmes des parias dont personne ne veut.
Plusieurs centres existent sur le plateau central, le plus connu est certainement Delwendé de Tanghin qui accueille des femmes pour la plupart bien ancrées dans le troisième âge. Elles habitent à 20 dans de vastes pièces avec une natte comme seule couche et s'occupent en pratiquant le maraîchage, en filant le coton comme autrefois et en se racontant leurs misères respectives.
Ces femmes sont accueillies par des religieuses qui font ce qu'elles peuvent avec les dons reçus. Nous devons tous avoir honte de n'avoir pu nous défaire de certaines peurs ancestrales et de continuer en 2010 à accuser des femmes de sorcellerie et à les parquer dans des lieux isolés où nous n'osons pas mettre les pieds.
Lorsqu'on écoute l'histoire de ces femmes, on se rend compte qu'elles ont eu époux et enfants et qu'un jour, brusquement, tout a basculé à cause d'accusations gratuites faites par des hystériques pour des raisons souvent personnelles; et on ne sait pourquoi, l'hystérie est devenue collective en les jetant à la vindicte populaire.
On a du mal à croire qu'en 2010, de telles absurdités puissent encore exister. Les pouvoirs publics doivent protéger non seulement ces femmes mais aussi toutes celles qui sont susceptibles d'être accusées de sorcellerie. Des lois doivent être votées pour punir tous ceux qui se permettraient de faire de telles accusations.
En cette journée du 8 mars 2010, pensons donc à ces femmes qui ont tout perdu, qui ne sont jamais conviées aux festivités, n'assistent à aucune conférence, aucune marche, qui ne portent pas d'uniformes multicolores, ne reçoivent aucune rose ni aucune attention particulière. Battons-nous pour leur cause et croyons plus au pouvoir de l'amour du prochain qu'à celui supposé de Satan.
© Fatoumata Kane, 8 mars 2010
Editor ([email protected])
The University of Western Australia/French
Created: 8 March 2010
https://aflit.arts.uwa.edu.au/IneditKane_2010.html