Aminata TRAORE
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    Aminata Traoré est d'origine malienne. Née en 1947, elle arrive en Côte d'Ivoire en 1963 pour rendre visite à une de ses sœurs mariée dans ce pays. Elle y rencontre son futur mari et, après avoir obtenu un doctorat en psychologie sociale en France, s'installe en Côte d'Ivoire où elle occupe differents postes importants : « J'étais Chercheur à l'Université d'Abidjan, de 1975 à 1988, et détachée auprès du Ministre de la Condition Féminine de Côte d'Ivoire, dit-elle au cours d'une interview. J'ai ensuite travaillé de 1988 à 1992 dans un programme régional du PNUD visant à promouvoir le rôle des femmes et des communautés défavorisées dans la gestion de l'eau et l'assainissement. Cet itinéraire m'a appris à mieux appréhender la relation de cause à effet entre les réalités internes à nos pays et l'ordre du monde. J'ai occupé le poste de Ministre de la Culture et du Tourisme au Mali de 1997 à 2000. Je suis essayiste et l'une des animatrices du mouvement social au Mali et en Afrique. Sur le terrain, j'essaie de vivre mon discours quant à un autre monde possible à travers des micro-réalisations dans les domaines de la culture, la réhabilitation des infrastructures des quartiers défavorisés, dont le mien, ainsi que la promotion des textiles et de l'artisanat africains. » [Source: Interview FR2 2005].

    Ouvrages publiés


    Mille tisserands en quête de futur. Bamako: EDIM, 1999.

    L'étau. L'Afrique dans un monde sans frontières. Arles : Actes Sud, 1999. (190p.). ISBN 2 7427 2032 4. Essai.





    AVANT-PROPOS

    Un siècle qui s'achève est un tournant d'une grande solennité. Les rituels de fin d'année - échanges de vœux et résolutions - restent semblables, à la différence que l'on souhaite avec davantage de ferveur que nos voeux s'exaucent. Le XXIe siècle annonce également un millénium. Il est, de ce fait, doublement solennel. Les grandes puissances le préparent activement, fébrilement.
    Face à cette échéance et au grand remue-ménage, il arrive souvent à la femme africaine et malienne que je suis de psalmodier ces prières, que nous échangeons dans mon pays, lors des fêtes du ramadan et de la Tabaski : "Vœux d'ennemis, vœux d'amis, que tes propres vœux soient exaucés." Celui qui s'adresse en ces termes à un parent, un ami ou un voisin, sous-entend que cette personne est la seule à connaître, au plus profond d'elle-même, ce qu'elle veut pour elle-même. Si la démocratie trouve, aujourd'hui, une si forte résonance dans notre imaginaire, c'est précisément parce qu'elle nous apparaît comme le régime politique qui devrait nous permettre, à nous Africains, d'avoir, enfin, droit à ce que nous voulons, au plus profond de nous-mêmes, pour nousmêmes. Nous l'appelons de tout notre vœu, depuis longtemps déjà, et avec obstination depuis la fin de la guerre froide. Mais les difficultés subsistent.
    Le pluralisme politique qui avait tant fait défaut à nos Etats postcoloniaux se révèle paradoxalement porteur de conflits et de nouvelles meurtrissures.



    « Aminata D. Traoré, psychosociologue et femme d'entreprise, artiste décoratrice à ses moments perdus, s'est fait connaître sur la scène internationale par ses prises de position affirmées sur la situation critique de l'Afrique et sur la condition de la femme africaine. Aujourd'hui Ministre de la Culture et du Tourisme du Mali, elle n'a rien abdiqué de ses convictions.
    Son livre est une chronique : le regard tendre et lucide qu'elle porte sur la société dans laquelle elle vit donne aux anecdotes du quotidien toute leur portée. C'est aussi un essai, où l'analyste expose avec clarté et concision la situation dans laquelle se trouvent son pays, le Mali, et son continent, l'Afrique. Mais c'est surtout un cri d'alarme et un plaidoyer politique. Poids exorbitant de la dette, rôle ambigu du FMI, l'auteur répond par la reprise en main des décisions, par le refus d'une démocratie régulée de l'extérieur et paf la singularité culturelle africaine. Au cœur de l'action, Aminata Traoré éprouve quotidiennement l'urgence de trouver des solutions et le besoin de transformer le monde : les propositions qu'elle énonce sont courageuses et novatrices, vont à l'encontre des idées reçues et révèlent, par-delà le pragmatisme de la femme de pouvoir, la profonde humanité d'une femme de cœur, qui se trouve, pour reprendre le titre d'un de ses chapitres, "au coeur de l'être". » (Quatrième de couverture)

    Le viol de l'imaginaire. Paris : Fayard et Actes Sud, 2002. (212p.). ISBN 2 213 61114 2. Essai.





    Prise de parole

    « Tout est lié. Tout est vivant. Tout est interdépendant », nous enseigne Amadou Hampâté Bâ en se référant aux religions traditionnelles africaines. C'est pourquoi, ajoute-t-il, chaque action a une répercussion qui lui est propre sur l'ordre universel. L'homme doit assumer sa responsabilité quant aux liens - tantôt visibles, tantôt invisibles - dont l'ensemble confère un sens à la vie. De l'animisme, diront certains. De la spiritualité, leur rétorquerai-je, c'est-à-dire cette part d'humanité qui aurait pu nous mettre à l'abri de tant de tourmentes si la marche du monde ne l'avait pas évacuée.
    Cette pensée africaine de l'homme dans l'univers a, justement, une fonction: elle nous prédispose à être les acteurs et actrices d'une mondialisation véritablement heureuse parce que profitable à tous, en raison non pas de l'abondance des biens et des services, mais de la diversité des peuples et des cultures en présence.




    « Il n'est rien de plus encombrant ni aliénant qu'une image de soi et de sa place dans le monde qui se nourrit des désirs et du discours des autres. Depuis plus de quarante ans, l'Afrique cherche sa voie, mais en vain. Elle est dans l'impasse. Les violences de l'Histoire ayant fait des vainqueurs et des vaincus, des gagnants et des perdants, les rapports entre nations riches et nations pauvres demeurent des rapports de domination qui se perpétuent à travers des mots clés, qui ne sont que mots d'ordre. Pillée et marginalisée, l'Afrique est invitée par les maîtres du monde à se penser pauvre, à se comporter en région pauvre. Les Etats du continent, surendettés et interpellés par une demande sociale forte, se voient contraints d'adopter et d'appliquer des remèdes dont le coût social et humain est exorbitant. Or l'Afrique est la seule à détenir les remèdes à ses maux. Plus que de capitaux, de technologies et d'investisseurs étrangers, elle a besoin de retrouver cette part d'elle-même qui lui a été dérobée : son humanité. Car, contrairement à l'Homo oeconomicus, en se mondialisant, l'humain qui est en chacun de nous et que les Africains revendiquent s'enrichit mais enrichit surtout les autres et met la planète à l'abri de bien des saccages.
    La grande voix africaine, ancienne ministre malienne de la Culture, signe ici un livre bouleversant sur la douleur d'une Afrique mutilée par la mondialisation libérale. » (Quatrième de couverture)
    Note de lecture, Dominique Gentil, 2002 (RTF) [Consulté le 16 janvier 2007].

    Lettre au Président des Français à propos de la Côte d'Ivoire et de l'Afrique en général. Paris : Fayard, 2005. (212p.). ISBN 2 213 62470 4. Essai.





    Vivre debout

    Le « Non » irait comme un gant à l'Afrique noire, Monsieur le Président de la République française, s'il nous était donné à nous, peuples de vos anciennes colonies, de nous prononcer sur la nature et les desseins de l'Europe. Je sais que le simple fait d'établir un tel lien entre l'Occident, qui a le vent en poupe, et une Afrique en état de déliquescence peut paraître saugrenu.
    Quelle communauté d'intérêts et de destin peut-il y avoir entre la France, dont l'agriculture est la première d'Europe et qui possède TotalFinaElf, Renault, Alcatel, France Telecom, Axa, EDF, Bouygues.... et une Afrique noire dont le nom rime désormais avec misère, sida, famine, coups d'État, guerres et émigration ?



    « Contrairement à une idée bien répandue, en France comme en Afrique, la crise qui secoue aujourd'hui la Côte d'Ivoire est loin d'être une affaire interne à ce pays. Jusqu'en septembre 2002, le pays de Félix Houphouët-Boigny était en effet avant tout le modèle le plus achevé de l'ouverture des anciennes colonies françaises d'Afrique noire au libéralisme économique. Son implosion révèle l'échec criant de ce modèle, et surtout ses conséquences dramatiques pour tous les peuples d'Afrique. Dans sa lettre ouverte à Jacques Chirac - l'homme du refus de la guerre en Irak, l'«avocat» de l'Afrique à travers la francophonie, au niveau de l'Union européenne et des instances internationales -, Aminata Traoré décrypte la politique africaine de la France, ainsi que l'ordre cynique du monde dans lequel elle s'inscrit et auquel elle participe. Elle invite surtout le président de la République française et tous ses homologues occidentaux à donner enfin les moyens à l'Afrique de vivre de ses propres richesses et de décider de ses propres orientations. » (Quatrième de couverture)

    L'Afrique humiliée. Paris: Fayard, 2008. (296p.). ISBN: 978-2-213-63590-3. Essai. [Préface de Cheikh Hamidou Kane].





    L'ennemi subsaharien

    Chaque fois que les peuples européens ont concrètement tenté d'englober tous les peuples
    de la terre dans leur conception de l'humanité, ils ont été irrités par l'importance des
    différences physiques entre eux-mêmes et ceux qu'ils rencontraient sur les autres continents.

    Hannah Arendt

    Obsédante est la question du soi dans un monde bouleversé, tourmenté. Nous, peuples d'Afrique, autrefois colonisés et à présent recolonisés à la faveur du capitalisme mondialisé, ne cessons de nous demander : qui sommes-nous devenus?
    Le système économique dominant bouleverse les repères, les rapports à soi, à l'autre et entre les nations.



    « ... Les pays riches ont peur de notre présence quand elle n'est pas susceptible d'ajouter à leur avoir, peur de nos différences quand elles sont trop visibles. Inutiles, les nouveaux naufragés entassés sur des embarcations de fortune, supposées les conduire vers la terre ferme de l'Europe. Invisibles, les désespérés qui traversent l'enfer du désert. Indésirables, ceux qui, menottes aux poignets, sont reconduits dans leur pays d'origine.
    Mais l'humiliation du continent africain ne réside pas uniquement dans la violence, à laquelle l'Occident nous a habitués. Elle réside également dans notre refus de comprendre ce qui nous arrive. Car il n'y a pas d'un côté une Europe des valeurs et du progrès et de l'autre une Afrique des ténèbres et des malheurs. Cette vision, que certains d'entre nous ont tendance à intérioriser, vole en éclats dès l'instant où l'on touche du doigt les mécanismes de la domination, de la paupérisation et de l'exclusion.
    Le défi auquel nous faisons face aujourd'hui, c'est d'imaginer des perspectives d'avenir centrées sur les êtres humains. Une réappropriation de nos destins qui fait appel à nos langues, à nos repères, à des valeurs de société et de culture qui nous sont familières. » (Quatrième de couverture).

    "L'Argent des migrants. Combien ? Comment ? Pourquoi ?". In L'Argent : En avoir ou pas. Nantes : Editions Pleins Feux, 2007, pp.9-25. ISBN 978-2-84729-069-1. Conférence inaugurale des Rendez-vous de L'Histroire de Blois, octobre 2006.

    L'Afrique mutilée. Bamako: Taama, 2012. (48p.). ISBN 978-99952-855-0-0. Essai. En collaboration avec Nathalie M'Dela-Mounier.






    Présentation de l'ouvrage

    « Nous, femmes africaines, ne sommes audibles que lorsque nos voix confortent le discours misérabiliste et condescendant sur notre situation, souvent réduite à celle de femmes « pauvres, mutilées et enceintes ». Les politiques néolibérales qui saignent notre continent à blanc avec la complicité de dirigeants « démocratiquement élus » mais corruptibles et corrompus sont, elles aussi, mutilantes. En d'autres termes, une excision peut en cacher une autre. Cette réalité doit se savoir, être dite et inscrite au cœur du débat politique pour la seconde libération de l'Afrique et plus particulièrement du Mali. » [Renseignements et diffusion 2012 - pdf file]


    Aminata Dramane Traoré et Boubacar Boris Diop. La Gloire des imposteurs. Lettres sur le Mali et l'Afrique. Paris: Philippe Rey, 2014. (236p.). ISBN: 978-2-84876-232-6. Correspondance.





    « Le succès de l’opération Serval au Nord-Mali en janvier 2013, quarante-neuvième intervention militaire de la France dans son pré carré africain, a dépassé toutes les attentes. Ses soldats y ont été accueillis en libérateurs tandis que des intellectuels africains de renom, jusque-là peu suspects de complaisance à l’égard de la Françafrique, se sont bruyamment réjouis de son action, jugée énergique et courageuse.
    On peut comprendre ce soulagement, car il était impératif de mettre hors d’état de nuire la coalition des maîtres d’oeuvre du sanglant chaos malien. Mais la haine de ces derniers n’a-t-elle pas incité à ramener un conflit complexe à une banale lutte entre le Bien et le Mal ?
    C’est à cette question que s’efforcent de répondre Aminata Traoré et Boubacar Boris Diop dans un stimulant et franc échange de lettres… La gloire des imposteurs met en évidence une reprise en main néo-impériale de l’Afrique subsaharienne, par une violente agression militaire se présentant comme une odyssée morale, généreuse et totalement désintéressée. Mais, un an après, il y a lieu de se demander si, comme l’Amérique de Bush en Irak, la France n’a pas pavoisé un peu tôt au Nord-Mali où elle est en train de s’embourber. Au-delà du Mali, véritable cas d’école, les deux auteurs partagent leurs réflexions sur les guerres actuelles de l’Occident hors de ses frontières, ainsi que sur la Côte d’Ivoire, la Libye ou l’énigmatique printemps arabe. Et chaque conflit leur offre l’occasion de mettre à nu les mécanismes de la même triomphante imposture. » (Quatrième de couverture)


    Pour en savoir plus

    Interview d'Aminata Dramane Traoré, Organisatrice du Forum pour un autre Mali. jeudi 18 mars 2004. (Interview filmée le 5/03/2004 à 15H20 à l'Hôtel Djenné). [Consulté le 15 janvier 2007].

    Aminata Traoré : l'alternative africaine. Traversées Bamako - Mali, le 13 juillet 2004. [Consulté le 15 janvier 2007].

    Le Forum pour l'autre Mali. [Consulté le 15 janvier 2007].

    Sophie Galtier. "Aminata Traoré : une grande voix africaine". Interview FR2. 16 décembre 2005. LesOgres.Org. ["https://lesogres.org/article.php3?id_article=1118"]. [Consulté le 15 janvier 2007 - indisponible en 2012].


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    Editor ([email protected])
    The University of Western Australia/French
    Created: 15 January 2007
    Modified: 28 November 2014
    Archived: 28 November 2014
    https://aflit.arts.uwa.edu.au/TraoreAminata.html