L'AFRIQUE ECRITE AU FEMININ Notes de lecture |
Recensions proposées dans divers blogs, sur la toile et partout où la lecture est au rendez-vous de l'écriture du monde africain |
Note de lecture de Grâce Minlibé proposée sur son blog « graceminlibe, lire, écrire, vivre », 2015
Quinze nouvelles aux belles ouvertures
L'attente fortement ressentie par le personnage de la nouvelle Obsession... qui a inspiré le titre de ce recueil est un leitmotiv partagé par plusieurs autres nouvelles. Dans Marie-Espoir, Comment choisir? et Tic-tac, après maintes déceptions, la vie s'annonce enfin prometteuse pour Marie, Sakhine et Aboua. Quant à la cupidité, véritable gangrène sociale, elle fait prendre des risques à Betty, Elisa et Aby, trois jeunes dames pourtant pleines de vie dans Les attaquantes, et même à Jacob pour qui l'argent semble plus précieux que sa santé dans Le matelas. Ainsi va la vie, entre déboires et rayonnements, vices et innocences...
Dans ce recueil de quinze nouvelles, les travers de notre société comme l'inceste, le mariage forcé, l'escroquerie, côtoient des sentiments nobles tels que l'Amour et le Don de soi, pour montrer que l'Espoir est toujours et encore permis.
En parcourant la quatrième de couverture, on peut penser que ce recueil est banal, qu'il vaut un autre livre et pourtant... L'on ferait un « Reading-faux-pas » en sous-estimant la force de cette œuvre. En parcourant mon blog, vous pourrez voir que j'ai lu plus d'une dizaine de recueil de nouvelles, et si vous me demandez celui qui m'a le plus marquée, je vous dirais: Obsession de Komara Constance Mariam. J'ai l'habitude de lire des nouvelles avec des chutes brutales, inattendues: Komara Constance Mariam m'a fait découvrir des nouvelles aux belles ouvertures et forts goûts d'inachevé.
La majorité des nouvelles se terminent avec une action en suspens, l'auteur donne la liberté au lecteur de trouver la fin qui lui convient. La plume de l'auteur est simple, sans fioritures ce qui permet au lecteur de se projeter facilement dans les scènes décrites.
L'auteur ne veut pas ennuyer son lecteur et on le sent dans les moindres détails. Chaque héros de nouvelles a une profession différente ce qui nous permet de voyager dans des décors distincts: expert en développement durable, banquière, entrepreneur, professeur à domicile, policier... Il en est de même pour les sujets évoqués: inceste, recherche d'une ascension sociale, cupidité, corruption, pauvreté, chômage, mariage consanguin...
Quelles sont les nouvelles que j'ai préférées?
Marie-Espoir
. | Je parie qu'avec un prénom pareil, vous m'imaginez pleine d'espoir! Je vis sur une « Terre d'Espérance » mais hélas, je ne peux être la mascotte de mon pays tant je suis le pessimisme personnifié! |
L'emploi de Marie-Espoir est en-dessous de son niveau d'études, sa vie sentimentale est un désastre. Désespérée de sa situation, elle se réfugie dans la prière et les veillées à l'église. Là-bas, elle recevra une prophétie qui désignera son mari, un homme auquel elle ne s'attendait pas et le lecteur non plus...
J'ai beaucoup aimé cette nouvelle pour la mise en exergue d'un fait que l'on rencontre souvent dans les églises évangéliques où des couples sont formés sur la base de prophéties divines. Révélation divine ou calcul sentimental effectué par les pasteurs? Seul DIEU, le pasteur et le couple formé le savent... Cette nouvelle se termine sur un gros dilemme et j'avoue avoir élaboré plusieurs scénarii pour la suite de cette histoire.
J'y suis, j'y reste
. | J'y suis et j'y reste! Vous les jeunes d'aujourd'hui vous êtes ingrats. Comment comprendre que vous voulez me faire quitter la maison qui vous a vu naître? Dans cette maison, j'ai été pauvre. Dans cette même maison, j'ai eu ma fortune. |
Un père de famille refuse de quitter sa maison située dans un bidonville et pourtant sa situation financière lui permettrait de le faire. Pour quelle raison est-il si attaché à cette maison? La réponse est à la fin de cette nouvelle J'ai bien aimé le côté mystique de cette nouvelle qui fait 10 pages. Là encore, l'histoire s'achève sur un choix que doit opérer l'un des protagonistes de l'histoire et l'on ne peut en tant que lecteur s'empêcher de vouloir choisir pour lui.
Tic Tac parce que j'ai connu la période de chômage et toutes les interrogations qui en découlent.
Comment choisir? Rester dans une vie de maîtresse frustrée d'un homme marié ou épouser un étranger et vivre une union longue distance avec son corollaire, les contraintes, ou alors me mettre en couple avec un collègue avec tout ce que cela impliquera comme déconvenues professionnelles et racontars sur notre compte? A la place de l'héroïne, qu'auriez-vous fait? Moi, je cherche encore...
Et pourtant c'est lui. Un homme est accusé d'avoir volé le portefeuille d'un autre. L'accusatrice est formelle mais le portefeuille ne se retrouve pas sur l'accusé. Où se trouve-t-il donc? Cette nouvelle n'a que deux pages et j'ai beaucoup apprécié sa touche d'humour.
Veuf mais pas trop. Un homme perd sa femme. En plein deuil, il s'aperçoit que celle qu'il a épousé n'était pas vraiment sa femme... J'ai été agréablement surprise par la fin. Là encore, on ne peut s'empêcher de s'imaginer la suite des événements de l'histoire.
Fatalité qui dénonce les conséquences du mariage consanguin. L'histoire m'a beaucoup émue.
Quelques nouvelles ne m'ont pas séduite.
Renoncer. Le récit d'un policier qui se laisse entrainer dans la corruption et décide d'y renoncer. La moralité est forte mais je n'ai pas été transportée émotionnellement.
Mes yeux ont vu. Un amoureux de la nature au point de voir en elle une femme... L'histoire se lit aisément mais elle ne m'a pas emportée.
Le matelas. Un homme à l'apparence très pauvre et pourtant très riche. J'ai déjà entendu une histoire de ce genre avec le même début, le même corps et la même fin. Je m'attendais à une autre tournure de l'histoire, plus originale.
La grenouille du Marabout. Le début de la nouvelle ressemble à un conte. Je n'arrivais pas à entrer dans l'histoire. J'ai relu les premières pages à deux reprises.
Garba le Jouisseur veut officier comme marabout afin d'assouvir ses fantasmes démesurés. Il utilise donc un subterfuge pour arriver à ses fins. Son manège fait rire, la fin de l'histoire aussi mais je m'attendais à une autre tournure, à une fin plus explosive.
Je vous souhaite une très belle découverte de l'œuvre.
Grâce Minlibé Décembre 2015
https://graceminlibe.wordpress.com
[Pour les commentaires, voir le blog]
D'autres notes de lecture Lire les femmes et les littératures africaines [email protected] 17 avril 2016 https://aflit.arts.uwa.edu.au/komara_minlibe_15.html |
Fermer cette fenêtre |