Assamala Amoi, écrivain franco-ivoirienne, est née au début des indépendances à Paris où elle a vécu avec ses parents durant toute son enfance. De retour en Côte-d'Ivoire, elle fréquente le lycée, puis l'université à Abidjan d'où elle sort diplômée d'une maîtrise en littérature britannique et d'un DEA. D'abord professeur de lettres dans un lycée d'Abidjan Assamala Amoi travaillera ensuite au FNUAP puis à l'OMS de Brazzaville où elle occupe le poste d'éditeur en français. Auteur à succès, Assamala vient de publier un recueil de poèmes et de haïkus - poèmes japonais à trois vers - dont la brièveté permet d'attirer l'attention du lecteur sur un détail insolite, une image fugitive mais essentielle, AMINA l'a rencontrée. |
Comment dois-je vous appeler ? Assamala Amoi romancière, écrivain, poétesse ou haïkiste ?
Je pense que je suis écrivain tout simplement, puisque que je me suis essayé à divers genres littéraires. Même si je suis à la fois écrivain, romancière et poétesse.
Vous écrivez des haïkus, ces poèmes à trois vers d'origine japonaise...
Oui, en effet, j'aime la sobriété et le dépouillement qui les caractérisent et leur permet justement d'être des condensés de bon sens et d'émotion. Je les vois un peu comme les bonzaï de la littérature.
Pouvez-vous nous expliquer le titre de votre recueil de poèmes ?
Je l'ai intitulé "Poèmes de la rive du fleuve" parce que je vis maintenant sur la rive du fleuve Congo. C'est un très beau fleuve et je me suis dit que le titre serait adéquat puisque la plupart des poèmes que j'ai écrit l'ont été à partir d'un lieu géographique proche du fleuve.
Le poème "République" est un peu dénonciateur. De quelle République parlez-vous ?
Je ne pointe pas du doigt une République en particulier, mais l'Afrique en général. L'Afrique qui a beaucoup de ressources qui, malheureusement, ne sont pas exploitées ou alors à mauvais escient. Ce n'est qu'une partie de la population qui en bénéficie. Je sais bien que la justice n'est pas de ce monde mais la répartition des richesses de l'Afrique pourrait être mieux faite. Cependant, j'insiste pour dire qu'il ne s'agit pas d'un pays en particulier mais que les caractéristiques décrites dans le poème se retrouvent dans plusieurs pays d'Afrique.
La majorité de vos poèmes parlent d'amour et de paix. Quel message voulez-vous transmettre à vos lecteurs ?
Je n'ai pas véritablement la prétention de transmettre un message aux lecteurs et lectrices mais disons que j'essaie de communiquer avec elles en essayant d'analyser, de me pencher sur certaines émotions, notamment l'amour, parce qu'on a beau dire c'est un domaine, un sentiment qui occupe une grande partie de la vie d'un être humain. Quoi qu'on dise, quoi qu'on fasse, que l'on soit homme d'affaires, homme politique, ou femme au foyer, il y a quelque chose de commun à tous les êtres, c'est la recherche de la compagne, d'un compagnon je ne dirai pas idéal, mais le plus adéquat possible. Le rêve d'avoir des relations harmonieuses avec un(e) partenaire. Je parle de paix parce que pour moi, c'est primordial. S'il n'y a pas de paix dans un pays, il est impossible d'avoir un développement durable qui profite à tous.
Comment définissez-vous, votre écriture ?
C'est une question difficile. Je peux me tromper mais mon écriture varie en fonction du genre littéraire que je choisis. Par exemple, dans les romans, je mets un peu plus l'accent sur l'action, le réalisme. Dans mes poèmes, l'écriture est plus imagée. Dans mes livres pour enfants, elle est plus simple sans pour autant nuire à l'histoire qui doit charmer. Cela dit, je pense que mes lecteurs et les critiques littéraires donneraient une définition plus complète et plus pertinente de mon écriture.
Peut-on dire que vous êtes un écrivain engagé ?
J'accepte la catégorisation tout en me méfiant parce que pour moi un écrivain n'est pas uniquement quelqu'un qui est engagé, c'est aussi un artiste qui a un style, qui ne racontera pas un fait de société ou un événement de la même façon que le ferait un journaliste. Alors quand on me parle d'écrivain engagé, j'avoue que je me méfie beaucoup. Certains prétendent l'être mais quand on examine leurs écrits, on se rend compte qu'ils sont engagés mais point écrivains. Cela parce qu'il manque à leurs écrits la note artistique, le style plaisant qui atteint le coeur et l'intellect des lecteurs. Dans une certaine mesure, j'accepte qu'on me dise engagée sur la base de certains de mes poèmes mais bon ! Que cela ne soit pas au détriment des qualités artistiques et littéraires de l'œuvre. C'est vrai qu'on s'engage parce que les injustices, les guerres ne laissent pas indifférent et chacun a son cri de révolte à lancer.
Vous étiez professeur d'anglais à Abidjan. L'enseignement, l'encadrement ne vous manquent-ils pas ?
Non, l'enseignement ne me manque pas et je n'ai pas de regrets. Je pense que je continue d'une autre manière, en transmettant des idées, même si je ne me retrouve plus dans une salle de classe. Chacune des expériences professionnelles que je vis à la place est très enrichissante.
Vous travaillez comme éditeur à l'OMS, vous êtes écrivain et coordinatrice d'un club de gym. Comment arrivez-vous à concilier toutes ces activités ?
Je ne dirai pas que c'est très simple. J'arrive à mener de front toutes ces activités sur la base d'un calendrier assez strict. Il faut une certaine auto-discipline pour respecter cet emploi du temps. J'ai des horaires de travail sur lesquels rien n'empiète, c'est la priorité, mais après une journée de travail, certains jours, je donne des cours de gym aux collègues. L'écriture, c'est quand j'ai du temps libre. Si j'ai une urgence, je la traite avant de passer à autre chose.
Si on vous demandait de vous décrire en trois mots, que diriez-vous ?
Exigeante (avec moi-même), nomade (je m'adapte facilement à de nouveaux lieux) et pathologiquement curieuse (j'aime apprendre et vivre de nouvelles expériences) (rires).
Y a-t-il un écrivain qui vous a particulièrement marquée, que vous aimez ?
La liste est trop longue pour que je puisse tous les citer. A la base des
auteurs français, et certains auteurs africains et ensuite des
écrivains anglo-saxons et américains (j'adore lire en anglais),
des auteurs d'Amérique Latine et d'Asie.
J'ai beaucoup d'admiration pour les femmes écrivains d'Afrique; elles
sont toutes de véritables sources d'inspiration. Celles de mon pays, la
Côte-d'Ivoire, écrivent très bien et je les encourage
à aller de l'avant.
Quels sont vos projets à court et à moyen termes ?
Sur le court terme, c'est d'essayer de terminer un roman que j'ai commencé l'année dernière. A moyen terme, j'ai d'autres projets littéraires mais hors du domaine de la fiction. J'en garde le secret pour le moment.
Propos recueillis
par Nicole Mikolo