A 32 ans, Fatou Biramah n'a pas froid aux yeux. Originaire du Togo, elle est née dans le 13e arrondissement de Paris. Elle passe son enfance à Neuilly-sur-Marne, et son adolescence en Seine-et-Marne. Plus tard, elle s'installe dans son pays natal afin de connaître sa culture. De retour à Paris, elle termine ses études avec un BEP. En 2005, elle co-écrit, avec Audrey Diwan, une première biographie intitulée "Confessions d'un salaud" publiée aux Editions Denoël. C'est l'histoire d'un jeune dealer français, d'origine sénégalo-malienne, qui emprunte un parcours particulier. Dans son livre, Fatou Biramah montre l'aspect humain des cas sociaux. Par ailleurs, elle s'adonne au journalisme, elle est en effet pigiste pour plusieurs magazines consacrés au sport et au rap. Aussi, avec des amis, elle se lance dans une aventure en réalisant un documentaire intitulé "Réalité Mag". Ce dernier est destiné au droit de réponse. Son deuxième livre, "Négresse", s'articule autour de la correspondance entre deux voix qui se rejoignent. |
Comment peut-on interpréter la couverture de votre roman "Négresse" ?
D'une part, j'ai voulu jouer sur la contradiction de l'appellation "Négresse". En général, ce mot est perçu de manière péjorative. Par négresse, on comprend "esclave", "bonne à tout faire". Personnellement, je trouve ce mot très beau. J'ai voulu, d'une certaine manière, en redorer le blason. D'autre part, la couverture de mon roman montre une femme noire qui présente un dos nu. La femme est le berceau de l'humanité. Elle représente l'Afrique, Le dos nu, quant à lui, supporte le poids de la souffrance. J'ai encore en mémoire l'image de Kounta Kinté recevant des coups de fouet sur le dos. A travers ce livre, j'ai voulu monter la soif de réussite des Noirs.
Que représente Touna, le personnage principal de votre roman ?
C'est une métisse togolaise qui a du mal à trouver son identité. De plus, elle rencontre des problèmes relationnels avec ses parents et son entourage. Elle cherche sa place dans la société. Le personnage de Touna tire sa force de sa complexité. Touna, c'est moi.
Vous utilisez un vocabulaire vulgaire, en proie à la haine et à la violence. Pourquoi ?
C'est ce que je suis, c'est ce que je vis. C'est ma manière de m'exprimer. J'ai été élevée dans cette violence. Elle fait partie de moi. Je la maîtrise et la contrôle.
Vous avez écrit votre roman avec Sophie Blandinières. Comment vous est venue l'idée de cette collaboration ?
C'est l'éditeur de mon premier roman, Guy Birenbaum, qui nous a présenté l'une à l'autre. L'excentricité et la spontanéité de Sophie m'ont beaucoup plu. C'est ainsi qu'est née une grande amitié entre nous. Elle a fait un travail de psychologue. C'est elle qui a mixé et structuré "Négresse".
Vous êtes aussi très impliquée dans le mouvement hip-hop. Pour quelles raisons ?
C'est un mouvement au sein duquel je me sens bien. Je me retrouve dans les textes des rappeurs. J'apporte ma contribution à travers le journalisme, en mettant en avant tous ces artistes noirs. Le mouvement hip-hop, c'est notre littérature. J'aurais souhaité faire du rap. C'est pourquoi je produis ces artistes.
Avez-vous d'autres projets en cours ?
Il y aura une suite de la biographie de "Négresse". Je m'investirai dans la production d'artistes. Je compte aussi monter sur scène pour interpréter mes propres compositions. J'ai également un projet de pilote d'émission pour 3A Télé Sud, dans le domaine du hip-hop.
Propos recueillis
par Wanda Nicot
Fatou Siramah et Sophie Blandinières, "Négresse" aux Editions Travées, 2006.