Les Baigneurs du Lac Rose
Tanella BONI est née à Abidjan. Elle a fait ses études de Lettres à Toulouse puis Paris (Hypokhâgne et Khâgne), des études de Philosophie à l'Université de Paris-Sorbonne (Paris IV). |
Après sa thèse de 3ème cycle (1979) elle enseigne à l'Université d'Abidjan comme Assistante puis Maître-Assistant jusqu'à son doctorat d'Etat (1987). Elle est aujourd'hui Professeur à l'Université d'Abidjan et Directeur de programme à l'Etranger au collège International de Philosophie (Paris). Elle est aussi poète et écrivain, actuellement Présidente de l'Association des Ecrivains de Côte d'Ivoire. Elle vient de publier aux Nouvelles Editions Ivoiriennes (01 BP 1818 Abidjan 18) un roman intitulé "Les Baigneurs du Lac Rose". Elle a bien voulu répondre à nos questions.
Comment expliquez-vous la vitalité de l'édition ivoirienne qui produit régulièrement des oeuvres de femmes écrivains ?
Je ne sais pas comment l'expliquer. Disons que les femmes écrivent de plus en plus. S'il y a de plus en plus de livres de femmes édités, cela veut dire qu'il y a certainement davantage de femmes qui s'intéressent à l'écriture. Mais ceci étant dit, les hommes aussi écrivent. Je ne crois pas vraiment qu'on accorde la priorité aux femmes.
Vous venez de publier un roman "Les Baigneurs du Lac Rose" après des poèmes et de la littérature pour la jeunesse?
Je cherche des manières de dire. Et en ce sens là, je ne me cantonne pas à un seul genre. Il est vrai que j'ai commencé par la poésie, mais j'aime bien aussi raconter des histoires que j'ai moi-même créées. Je pense que le roman est un genre dans lequel je me sens assez bien. Quand j'en écris un, j'essaie d'y retrouver de la poésie.
Le lac rose se trouve au Sénégal. Votre roman a-t-il pour cadre le Sénégal ?
Non... On retrouve plusieurs cadres dans ce roman. Il y a la Côte d'Ivoire, certaines villes de France comme Paris. Il y a aussi le Sénégal et bien d'autres lieux. Le lac rose auquel je fais allusion, est un lac qui existe réellement mais on peut l'entendre de façon symbolique. A chacun sa lecture.
Quelle est la place de la femme dans votre livre ?
La femme occupe une place prépondérante dans la mesure où c'est une femme qui en est le personnage principal.
Parmi les thèmes abordés : le métier de journaliste avec tous les riques que comporte la recherche de l'information. Auriez-vous aimé exercer ce métier ?
Je pense que c'est un métier très noble. J'avais envisagé de l'exercer quand j'étais jeune. Il faisait partie des métiers qui me plaisaient beaucoup. Je pense que le journaliste est un peu comme l'écrivain, un peu comme l'historien. Le journalisme est un métier dans lequel on doit pouvoir se réaliser pleinement parce qu'on va au devant de l'information. Il est plein de risques. Ca doit être tout à fait passionnant!
Pourquoi avoir choisi pour thème dans votre roman l'imaginaire ou le rêve ?
Je ne sais pas si c'est un choix. Quand on écrit, il y a toujours des choses qui s'imposent à nous. Il y a bien sûr ce qu'on choisit consciemment et ce qu'on ne peut choisir. Et il me semble que le rêve et l'imaginaire font partie de ce qu'on ne peut choisir.
La dimension historique est aussi présente à travers MISORA. N'est-ce pas SAMORY ?
Oui... Enfin, on peut faire des rapprochements, mais ce n'est pas par hasard que j'ai mis un anagramme. C'est pour que cela puisse avoir une portée universelle. Ce peut être SAMORY, ce peut être aussi un autre héros. J'ai voulu tout simplement montrer que notre histoire nous parle, nous permet de comprendre la situation dans laquelle nous vivons aujourd'hui.
Pour vous, comment naît une passion ? Comment faire durer la flamme d'un amour ?
Comment na&icir;t une passion ? Je crois qu'on ne peut pas le dire parce qu'une passion peut naître d'un rien. Elle peut naître d'une situation inattendue mais ce qui est certain, c'est que la passion ne na&icir;t pas toujours là où on l'attend. Elle arrive toujours par hasard. Je crois qu'il n'y a pas de recette pour la faire durer.
Quel intérêt fondamental nos lectrices peuvent-elles tirer de votre roman ?
Ca dépend de chacune d'elles et de ce qu'elles ont envie d'y trouver. Si elles recherchent une histoire d'amour, je crois qu'elles seront servies, même s'il ne s'agit pas d'une histoire d'amour à l'eau de rose comme on peut l'imaginer, à cause du titre. Si c'est une histoire politique, je crois qu'elles seront également comblées.
Vous êtes la présidente des écrivains ivoiriens. Quelles sont la place et le rôle des femmes dans cette association ?
Les femmes écrivent non seulement de plus en plus en Côte d'Ivoire, mais aussi de manière générale sur l'Afrique. Je crois qu'elles prennent de plus en plus la parole. Notre association ne regroupe pas uniquement des Ivoiriennes. En effet une Française ou toute autre étrangère résidant en Côte d'Ivoire, peut faire partie de cette association.
On écrit beaucoup pour les adultes et les enfants. Mais il manque au niveau de la littérature africaine des textes pour adolescents. Comment l'expliquez-vous ?
De manière générale, ceux qui écrivent pour la jeunesse ne sont pas considérés comme des écrivains. Ce qui est dommage parce que les adolescents ont besoin d'une littérature qui leur soit propre. Prenez "le Petit Prince" de Saint Exupéry. Personnellement c'est un livre que j'aime beaucoup. L'auteur a dédié son ouvrage à un de ses amis : Léon, qui n'est pas un adulte. Cela veut dire que souvent quand on a quelque chose de fondamental à dire, on ne l'exprime pas forcément dans la littérature pour adultes. On fait en sorte que le texte soit à la portée du plus grand nombre possible.
Professeur titulaire, écrivain, présidente de l'association des écrivains, mère, votre famille a-t-elle encore la possibilité d'avoir un peu votre chaleur ?
Je crois que chacun choisit la vie qu'il veut mener. Ce qui signifie que, quelles que soient les charges qui s'imposent à vous, il faut s'en arranger. Même si ce n'est pas facile. Ma famille n'est pas coupée de ce que je fais, bien au contraire. Je pourrais même dire que, je trouve dans mon mari et mes enfants, des raisons supplémentaires d'écrire. C'est pareil pour mon métier. Même s'il me prend beaucoup de temps, il me soutient dans mon écriture.
En conclusion ?
La littérature est comme un chemin, une école de la vie. Quand on emprunte ce chemin, ce n'est jamais facile. C'est pourquoi, nous femmes, nous avons besoin d'être encouragées, afin que nous n'abandonnions pas dès la première difficulté.
Propos recueillis par Isaïe Biton Koulibaly