RENCONTRE AVEC MME AMINATA SOW FALL
LE 5EME LIVRE D'AMINATA SOW FALL
LE JUJUBIER DU PATRIARCHE
C'est dans le cimetière du village de l'ancêtre Yelli que se trouve le jujubier qui ayant vécu longtemps sur la tombe de l'ancêtre est mort puis a reverdi. Yelli devenu vieux veut revoir le jujubier avant de mourir. Retour au village avec réjouissances, griots, rêve etc... et... les chants pour les morts. «Le Jujubier du Patriarche» est peut-être le roman le plus intellectuel d'Aminata Sow Fall. Evidemment pour un lecteur de Brazzaville, de Montréal ou de l'Ile Maurice il lui faut avoir quelques notions sur le Sénégal pour se délecter dans ce livre mais tous comprendrons les problèmes sociaux abordeés dont certains se retrouvent dans tous les pays africains sinon du monde. La poésie qui chante la geste d'héros anciens sont comme ces musiques classiques qui poussent automatiquement au recueillement et à la méditation. Editions Khoudia du Centre Africain d'Animation et d'échanges culturels BP 5332 Dakar (Poste de Fann) Tél. 21 10 23. |
Dans «le jujubier du patriarche» vous abordez la question des castes. Cette question a-t-elle toujours beaucoup d'importance dans la société sénégalaise. Vous semblez souhaiter la disparition de la mentalité «caste»?
Il est difficile de dire que la question des castes a toujours beaucoup d'importance dans la société sénégalaise. Le problème est certes posé, de temps à autre, par des intellectuels. Mon sentiment est que la société est en train de se restructurer et que l'argent et le pouvoiréconomique jouent un rôle très important dans cette restructuration. Vous constatez que nous sommes en campagneélectorale et qu'aucun candidat ne parle du phénomène des castes. Je pense que l'être humain ne vaut que par ses qualités morales. Dans «Le jujubier du patriarche» il est question de la participation effective de la caste des esclaves à la sauvegarde des intérêts matériels et moraux de la société. Par ailleurs, je sais que dans certaines familles aristocrates, le premier geste, à la naissance d'un bébé,était de lui faire têter le sein d'une griotte. Mon roman s'appuie sur le passé où le rôle des castesétait important. J'ai analysé les rapports dans une perspective (uneétude historique et sociologique aurait été plus précise) tout en ne perdant pas de vue que les mentalités se forgent en fonction des réalités, des besoins, des aspirations, etc.
Vous épinglez les expulsions de Ouest-Africains du Zaïre, ainsi que «La mauvaise odeur» des Africains dont a parlé un politique Français. Pouvez-vous nous dire pourquoi ces deux faits sontévoqués dans votre livre?
Je trouve inadmissible que des Africains en chassent d'autres car l'Afrique appartient à tous ses fils et je pense que les dirigeants africains qui expulsent leurs frères confirment l'image très nègative et pas du tout respectée que les Occidentaux se font de nous. Sur au autre plan, on ne peut pas ne pas réagir contre ce racisme aigu qui sévit en Europe et qui autorise des déclarations immorales de la part de responsables politiques.
Ces deux faits apparaissent dans mon livre comme un moyen de me décharger d'une colère sur un espace où règne l'imaginaire. Tout se tient.
En page 116 Lambi déclare «...Il n'y a aucun mal à jouer à son aise du jardin légitiment acquis». Sarebibi a aussitôt compris qu'il s'agit du Coran (Sourate 2 verset 223). Mais sa réponse réjoint les spartiates ou les stoiciens grecs, ou mieux la chasteté telle qu'elle est exaltée dans l'Evangile. Pourquoi ces lignes dans le livre?
Parce que j'adore cette philosophie de maîtrise, de résistance, de dépassement. Elle m'exalte. Elle me donne la véritable dimension de l'Homme. Sa grandeur...après Dieu, bien sûr.
Lesécrivains du Sénégal sont divisés en deux associations. Celle dont vous êtes vice-présidente vient d'être créée. Pourquoi cette division?
Ce n'est même pas une division car de nombreux membres de l'UNES (notre association) n'étaient pas membre de la première association. Puisque cette dernière n'a pas voulu convoquer une Assemblée Générale statuaire de renouvellement comme y invitent les statuts, nous avons pris nos responsabilités car nous ne pouvions pas rester indifférents à cette violation de l'esprit de la démocratie qui doit prévaloir en tout premier lieu chez des gens dont la première aspiration est la liberté.
Comment voyez-vous l'avenir de l'édition au Sénégal?
Très sombre parce que la crise et la concurrence frappent durement leséditeurs africains. Lesécrivains sont les premiers à en pâtir. Les Etats doivent aiderénergiquement leséditeurs en leur imposant aussi des résultats. Il faut de l'imagination et de l'agressivité commerciale pour vaincre les barrières et assurer une bonne diffusion du livre. L'Afrique offre d'immenses potentialités, il faut que leséditeurs les exploitent. C'est dur mais pas impossible.
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