Déjà il ronfle
Je peux peupler la chambre
De corps vivants
Fermer les yeux et les voir
S'aimer
Harassé
Exténué éreinté vidé
Il a tout donné aux boulots
Je le laisse dormir
Il me laisse mourir
Mais je refuse de mourir
Le noir
J'entends mes ombres
Et ce qu'elles font
J'appelle en pleurant
Mon meilleur amant
Proche il est si proche . . .
Mais ma main frôle
Un-sans-salaire-depuis-onze-mois
Fallait peut-être pas l'épouser?
A qui dire qu'il n'est plus
Désormais marié qu'avec des boulots?
Et là il ronfle
Mille boulots pour rassembler
Substitut à un salaire
Mais la possibilité d'être bien
La joie et l'appétit de vivre
Le vrai salaire
Il ne veut pas mourir
Pas revendiquer
Comme je ne suis
Qu'une femme
Ils me tueront d'un commun accord
Et ils me tueront je m'en moque
Ils me tueront de trouver
Un corps vivant
Sur qui ouvrir les yeux et le voir
M'aimer.
© Marie Claire Dati, 1996