D'allure altière,
Il aborde la vie,
Plein de dégoût
Pour tous ceux qui l'envient.
Mais le savent-ils ?
Savent-ils que cet homme du jour
Est une chauve-souris la nuit ?
Que ce gentleman des grands salons
Est un vampire à ses heures ?
Oh ! si seulement
Il pouvait faire autrement!
Le ventre redondant
Il sacrifie jour et nuit à Bacchus.
Au repas pantagruelique bien arrosé
Il voudrait ajouter la luxure;
Et traite d'avares ceux qui ménagent leur santé
Leur bourse et cultivent leur physique
En guise de loisir.
Mais si seulement ils savaient leur bonheur !
Si seulement ils savaient que
Ce gargantua est aussi un Harpagon.
Cryptomane congénital
Il se réfugie dans l'alcool et la bonne chaire
Pour ne pas se voir dans un miroir.
Oh ! si seulement il pouvait faire autrement !
Mais hélas ! Nature oblige.
L'incarnation de la sagesse c'est toi.
Le chantre de l'honnêteté c'est encore toi
Prêt à critiquer mes moindres errements
Oublies-tu, oui as-tu oublié
Que l'adultère c'est ton affaire ?
Que l'hypocrisie est ton fort ?
Que le cerveau national des Faymen* c'est toi ?
Oh ! si seulement tu pouvais faire autrement !
Oui s'il pouvait en être autrement.
Plus généreuse qu'elle tu meurs.
Cette créature est généreuse pour les deux sexes
Car dit-elle la vie est courte;
Car dit-elle son corps lui appartient.
Elle est généreuse pour la galerie.
Elle est généreuse pour le vice et pour l'argent.
Elle est victime des moeurs particulières,
Dont le contrôle lui échappe.
Mais elle brime sa mère, réduite à mendicité.
Mais elle rejette ses enfants devenus sans abris.
Oh ! si seulement elle pouvait faire autrement.
Dieu ! à la vérité
Si elle, lui, eux et nous n'avions
Un autre "Moi" différent du "Je" apparent ?
Un "Moi" qui nous dicte ses lois
Un "Moi" qui nous mène à sa guise et nous tient
Et souvent à notre corps défendant ?
Le monde ne serait pas ce qu'il est.
Et Dieu cesserait d'être Dieu.
Rabiatou Njoya
Yaoundé, 1er août 1996