Sanou LÔ
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    Je voudrais profiter de l'occasion qui m'est ainsi offerte de parler de moi pour rendre un vibrant hommage à tous ceux qui ont fait de moi la personne que je suis aujourd'hui. « Quand un bébé réussit à bien danser, c'est parce que sa mère lui fait exécuter ses pas de danse en le prenant dans ses bras », enseigne un proverbe sénégalais. Ma reconnaissance émue va d'abord à ma mère dont le souvenir reste à jamais gravé dans mon cœur, à mon père que j'ai toujours plaisir à écouter, à mes enfants qui sont la sève de ma vie, aux membres de ma famille pour leurs encouragements et leur soutien, et à tous ceux qui m'ont offert leur amitié. Je rends un vibrant hommage à tous ceux qui ont partagé leurs connaissances avec moi, en particulier à Monsieur le Professeur André Dommergues, pour la qualité de ses enseignements et de son écoute. Sa grande gentillesse, sa disponibilité et l'attention soutenue que sa famille m'a témoignée tout au long de mes études en France, resteront à jamais gravées dans ma mémoire.
    Je suis née en janvier de l'année 1957 à Saint-Louis, ville située dans la partie septentrionale du Sénégal. C'est dans cette ville historique (ancienne capitale de l'Afrique Occidentale Française), cernée par l'Océan Atlantique, le Fleuve Sénégal et le Petit Fleuve que j'ai passé mon enfance et une partie de mon adolescence. J'ai grandi dans un foyer monogame au sein duquel le chef de famille, mon père, a su concilier avec bonheur la sévérité et l'ouverture d'esprit dans l'éducation de ses enfants. Ma scolarité s'est déroulée normalement avec des résultats assez brillants couronnés par des distinctions et des prix, notamment le premier prix d'Histoire, obtenu un an avant le bac, au Concours Général des lycées et collèges, concours organisé au niveau national pour récompenser les élèves les plus méritants. J'ai quitté le Sénégal avant ma vingtième année pour aller poursuivre des études supérieures en France, à Lyon d'abord puis à Paris (Classes Préparatoires Fontenay-Saint-Cloud) et je ne revenais au Sénégal que pendant les vacances d'été. En 1983, j'ai obtenu le Diplôme d'Etudes Approfondies (D.E.A.) en Langues et Littératures anglaises et anglo-saxonnes avec la mention Très Bien et j'ai commencé alors la préparation d'une Thèse de Doctorat d'Etat. Je suis alors revenue vivre au Sénégal tout en séjournant fréquemment à l'étranger, en Europe notamment pour les besoins de mes recherches doctorales. Outre la rédaction de ma thèse, je dispensais également des cours à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar. C'est à ce moment-là aussi que j'ai entrepris la rédaction de mon roman, « De Pourpre et d'hermine » dont le titre initial était « Quand pleurent les flamboyants. » Titulaire d'une thèse de Doctorat d'Etat avec la mention Très Honorable avec les félicitations du jury, j'ai en même temps obtenu en France une Licence de Géographie.
    Mère de deux enfants, je partage mon temps entre ma vie de famille, la recherche, l'écriture et l'enseignement de l'anglais et de la littérature africaine anglophone au Département de Littératures et de Civilisations des Pays de langue anglaise de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar au Sénégal. A côté de la lecture qui reste mon passe-temps favori, j'ai un goût prononcé pour la poésie, la peinture, la musique, les rencontres culturelles, le cinéma, les nouvelles technologies de l'information et de la communication, les voyages et les promenades au bord de la mer. Ouverte sur le monde, je crois cultiver l'esprit de tolérance et voudrais œuvrer utilement pour le dialogue des cultures. Ceci dit, tout en me refusant à tout ce qui sclérose, je suis respectueuse des valeurs morales qui m'ont été inculquées et qui se fondent sur le « kerssa » c'est-à-dire la retenue, le « diome » (courage) , le « ngor » (la noblesse dans les actes de la vie), la rigueur dans le travail, le « mougne » (la persévérance) et la foi en la vie. Je ne m'arrêterai pas à ce premier roman. Un recueil de poèmes et une fiction politique sont déjà en préparation. Comme tout être humain, je rêve le monde et, à l'instar de tout écrivain, j'essaie de le façonner grâce à la magie du verbe. Enfin, mon souhait est de laisser de mon passage en ce bas-monde une empreinte... pour qu'on s'en souvienne ! Je terminerai cette présentation par ces lignes lumineuses et pleines de vie tirées de L'Inconnu sur la terre de J.M.G. Le Clézio :

    « Je veux écrire pour la beauté du regard, pour la pureté du langage. Je veux écrire pour essayer de rejoindre le vieil horizon, si net, pareil à un fil, et le ciel clair au-dessus de la mer. Je veux écrire pour être près des nuages blancs dans le ciel sombre, près de la lumière serrée du soleil, près des cimes des montagnes, là où seuls vont les éperviers. Je veux essayer d'être immédiatement là où mon regard se termine, là où il s'agrandit et reçoit sa joie. Je veux écrire pour être du côté des animaux, des enfants, du côté de ceux qui voient le monde tel qu'il est, qui connaissent toute sa beauté. Pour essayer de trouver une parcelle de cette vertu qui ne m'a pas été donnée à la naissance, mais qu'un visage de femme, ou d'enfant, au hasard de la foule un jour m'a montrée, comme le reflet d'une lueur étrangère aussi belle que le jour. Je veux écrire pour que cette clarté dure encore quelques instants, pour que le monde réel, vivace, reste encore quelques secondes dans la musique des mots. (...)
    Je veux écrire pour une autre parole, qui ne maudisse pas, qui n'exècre pas, qui ne vicie pas, qui ne propage pas de maladie. Quand le monde, à l'aube, est tendu, transparent et pur comme une gemme, air clair, mer bleue, rochers étincelants, ciel immense, horizon où les vagues sont visibles ; quand le monde, à midi, est parcouru de terrible victorieuse lumière, et que les arbres sont incendiés, et que l'asphalte mou reçoit les marques de pneu des voitures ; quand le monde glisse dans le crépuscule du soir lentement, s'apaise parmi ombres et fumées ; quand le monde est dans la nuit noire, froide et dense, et que rutilent les milliers d'étoiles, quelquefois, une seule lune... Comment alors peut-on désirer autre chose, comment peut-on dire autre chose ? Pourquoi l'homme a-t-il trahi le monde ? »

    [22 mai 2006]


    Ouvrage publié


    De pourpre et d'hermine. Dakar : Nouvelles Editions Africaines du Sénégal, 2005. (248p.). ISBN 2 7236 1519 7. Roman.





    Dix heures du matin. Le centre ville est en pleine effervescence. La circulation est déjà dense. Les bâtiments administratifs qui se dressent, imposants, le long du Boulevard de la République sont pris d'assaut par une foule compacte et fébrile. Les cars continuent de déverser aux portes du Plateau leurs flots de voyageurs venus prendre possession de leur cité. La rue des Flamboyants, seul îlot de verdure dans cet univers de verre et de pierre, charme la vue du passant. La beauté sauvage de ces arbres centenaires dont les fleurs s'épanouissent en grappes rousses sur les branches d'un vert vif, résiste à la force dévorante de la ville.


    Qu'est devenue la "Néné Touti", petite fille espiègle de Mame Koro, la douce aïeule ? Au fil des pages, l'héroïne fait un retour sur elle-même et ressuscite son passé tourmenté : Sélétou, Diassine, Thiobel, Ndolli, rue des Flamboyants ... autant d'étapes significatives qui résument la vie d'une jeune femme malmenée par la vie : mariée à l'âge de dix ans, elle tue son enfant et se retrouve en prison pendant des années avant de finir comme prostituée dans une rue de Dakar. Un vrai chemin de croix ! (D'après le roman et la quatrième de couverture)

    « En suivant le destin tortueux de l'héroïne, l'auteur dévoile une à une la chaîne de conséquences dramatiques qui peuvent survenir lorsque l'humain est soumis à des lois très (ou trop) rigides. Au delà de ce personnage central, le lecteur découvre une véritable fresque sociale du Sénégal profond : la polygamie avec ce qu'elle peut parfois drainer de haines et de rivalités : la longue absence du chef de famille, phénomène sociologique récurrent (ici l'exil n'est pourtant pas justifié par des contraintes économiques : il est allégoriquement transformé en pèlerinage initiatique, lorsqu'Oumarou quittera son foyer à des fins spirituelles, procédé qui permet alors une mise en abîme du parcours initiatique inverse, décadent, de l'héroïne) ; la perte des valeurs morales ancestrales associées au personnage de Badou, misérable Don-Juan perverti par la ville : le dévouement de certains citoyens, à l'instar de cet avocat commis d'office : le quotidien et la solidarité des prostituées, produits de l'exclusion... avec, en toile de fond, un croquis folklorique urbain, esquissant la vie des marchands ambulants, des mendiants, des disquettes, des awos, des riches parvenus, des gargotiers, etc. » (Nathalie Fave)

    Pour en savoir plus

    Fave, Nathalie. Compte-rendu du roman de Sanou Lô "De pourpre et d'hermine", Sud Quotidien Mardi 23 août 2005.

    Volet, Jean-Marie. "De pourpre et d'hermine" : une interview de Sanou Lô, Avril 2006.


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    Editor ([email protected])
    The University of Western Australia/French
    Created: 1 April 2006
    Modified: 22 May 2006
    Archived: 20 December 2012
    https://aflit.arts.uwa.edu.au/LoSanou.html