DE L'ARTICLE 2. M'Baye d'Erneville |
2. ANNETTE M'BAYE D'ERNEVILLE C'est du Sénégal que sont parties les premières notes de cette partition féminine qui allait bouleverser le choeur du chant africain. Celle qui la première tente le pari est une institutrice du nom d'Annette M'Baye d'Erneville (du nom de sa ville natale). À Paris, elle publie un petit recueil de 20 pages, Poèmes africains,[1] en 1965. L'Afrique indépendante n'a que 5 ans alors que sa littérature approchait déjà le demi - siècle. 50 ans pendant lesquels presqu'aucune voix de femme ne s'était fait entendre. Ces Poèmes africains de même que Kaddu [2](paroles) ont le ton nostalgique de la mère Afrique, de ses traditions, de ses tabous, mais portent aussi l'euphorie des indépendances nouvellement acquises :
Maître de la Kora! Que ne suis-je diseur Gardien des mots magiques!
Les femmes se serrent les reins, et, de leurs lourds pilons,
Tama, Gorong, Dioudioung L'euphorie suscitée par cette Afrique debout n'efface pas pour autant les traces des rituels qui se perpétuent :
Tu es homme, mon fils!
Par ton sang versé Par ton regard froid Par ta cuisse immobile.
Par ton sexe éprouvé Par ta peur refoulée Par la terre de tes Ancêtres (Kassacks , chant de circoncision, op. cit.) La mort, tel un rapace plane sur cette Afrique du passé qui se tourne vers un avenir incertain mais fait d'espoirs, de trop d'espoirs. L'Afrique nouvelle offrira-t-elle la vie ou le désespoir et la mort?
Ta voix a-t-elle encore les accents de la guitare monocorde Qui dans le pays de sable rythme les contes d'amour? Sais-tu encore les psalmodies nocturnes Qui font descendre la lune et la transforment en femme? (Nocturne , op. cit.)
Tu disais ta crainte de l'oiseau géant! Annette M'Baye a le mérite d'avoir balisé le chemin pour ses consoeurs qui prendront la plume après elle ... |
[1] Annette M'Baye d'Ernerville Poèmes africains. Paris: Centre national français, 1965, 20 p.
[2] Annette M'Baye d'Ernerville Kaddu. Dakar: NEA, 1966, 29 p.